En août 1964, Éric Chevillard naissait à l’hôpital de La Roche-sur-Yon. Trois mois plus tard, en ce même lieu, Gaston Chaissac décédait. « Je trouve exemplaires les attitudes de Chaissac, Beckett ou Michaux, je m’y réfère comme d’autres aux vies de saints. (…) Chaissac a inventé une façon bien à lui de se plaindre de ce qui l’accablait ou l’agressait. Une fausse naïveté, un petit monde joyeux mais sans illusion, traversé par une souffrance qui refuse les poses doloristes de la souffrance » déclarait Chevillard dans Lmda N°61.
On range souvent Chaissac dans le bric-à-brac de l’art brut. Pour Chevillard, « la seule chose qui l’apparente à l’art brut, c’est la pauvreté de ses moyens, et son insouciance absolue des canons de l’académisme ». Des canons dont les boulets n’entravent pas, non plus, la prose fantasque de l’écrivain.
Ces liens biographiques et esthétiques ont inspiré le texte que nous livrent aujourd’hui les éditions Argol : un dialogue en face à face entre 38 œuvres du peintre reproduites et autant de pages dues au romancier. Prenant la voix d’un Chaissac imaginaire, Chevillard dévide une pelote de petits textes qui rendent vie au monde réel et imaginaire du Vendéen.
Pensées de l’artiste, chronique des événements de son patelin, description des peintures et totems alternent en une sarabande parfois joyeuse et souvent douce-amère. Comme un leitmotiv, « le cerne noir » qui entoure les figures que traçait Chaissac vient ponctuer le texte. L’histoire d’un homme cerné de toute part. L’histoire d’un homme qui cherchait à cerner un autre monde. Se discerner. Un livre pour les amateurs du peintre ou du romancier, qu’ils soient nés, ou pas, à La Roche-sur-Yon.
D’attaque d’Éric Chevillard
Argol, « Entre-deux », 98 pages, 18 €
Domaine français Vendée challenge
novembre 2005 | Le Matricule des Anges n°68
| par
Pierre Hild
Un livre
Vendée challenge
Par
Pierre Hild
Le Matricule des Anges n°68
, novembre 2005.