auteur Jorge Luis Borges
A propos
Le grand mystificateur
La multiplicité des sens d’une œuvre essentiellement composée de textes courts qui semblent toujours s’appuyer sur d’autres, réels ou fictifs, ne cesse de nous rappeler l’inutilité de toute tentative d’épuiser le travail de Borges. L’auteur de L’Aleph aura su édifier depuis la position périphérique de Buenos Aires, ville où il est né en 1899, une histoire universelle de la lecture.
C’est la force paradoxale des classiques : leur omniprésence les condamne au lieu commun. Ainsi de Kafka, trop souvent résumé à un adjectif aussi commode que vague, la forêt du « kafkaïen » ayant tendance à simplifier, voire à contredire, la réalité de son œuvre. Même chose lorsqu’est brandi l’étendard du « borgésien » : une fois qu’on aura hâtivement convoqué l’encyclopédisme, les labyrinthes, les tigres et les miroirs, on n’aura rien dit. D’une certaine manière, les œuvres des écrivains qui modifient durablement notre façon de lire (thème « borgésien » s’il en est) sont trop grandes...
Mythe et représentation
Dans un essai récent, l’universitaire Julio Premat replace Borges dans son « argentinité » en soulignant à quel point son universalité s’ancre dans une mythologie locale qu’il aura su modifier, voire inventer à son propre bénéfice, devenant ainsi l’ADN des lettres australes.
Julio Premat, votre livre propose au lecteur français une approche plus argentine de Borges. Croyez-vous qu’on l’ait lu trop partiellement ?
Il y a d’excellentes lectures de Borges en France, mais je voulais souligner à quel point il est devenu le noyau d’un esprit littéraire argentin pas forcément perceptible ici. La critique française le lit depuis ses propres préoccupations, de même que...
Nuée d’oiseaux
Écrivain multiple (poésie, roman, nouvelles, essais) et traducteur, Christian Garcin a publié Borges, de loin et des romans où les labyrinthes et les rêves rappellent l’univers du maître argentin.
Christian Garcin, de quelles manières Borges a-t-il formé le lecteur et l’écrivain que vous êtes devenu ?
Probablement d’une double manière : par certains des thèmes autour desquels gravite une partie de son œuvre, et qui recoupaient les préoccupations encore informulées du jeune lecteur que j’étais (paradoxes temporels, figures du double, narration labyrinthique, spéculations métaphysiques,...