Chien de la barbare ; On ne récupère pas les bicyclettes le dimanche
Cinq ans après Les Vents contraires (Le Dilettante) où il évoquait son séjour dans les geôles d’une Afrique peu hospitalière -tout jeune, il y fumait mal à propos une herbe défendue- Dominique Joubert retourne au charbon. Lesté de ses désillusions d’homme mûr, il revient sur ses pas qui l’ont conduit en 1991 et 1993 à Anvers et Berlin. Sous le titre énigmatique du récit principal, Le Chien de la Barbare, se joue un mystère dont voici la clé : la Barbare est cette « muse » qui mène Joubert à Berlin et l’oublie lorsqu’elle cause avec ses amis écrivains au café Lenz. Lui, évidemment, c’est en chien qu’il se voit : « Etrange comme il se sent bouledogue ». L’auteur a adopté la défroque du cabot négligé. Il entame une virée pour noyer son ennui et « capter la note extraordinaire » de Berlin, la ville aux deux zoos.
Avec sa dose d’amertume et de belles trouvailles, Le Chien de la Barbare est un nouvel hommage de Dominique Joubert à l’humeur vagabonde, celle qu’il juge « la plus digne ». Car « l’homme qui s’égare reste l’invité du chemin. » Comme un marin en bordée, il est attiré par « Toutes les rues mal éclairées ». Il chaloupe, l’œil à la jumelle, croise des fantômes et des êtres, à l’instar d’une poignée de skinheads qu’il dépouille en quelques images. Aussi baroque, aussi truculente soit-elle, l’analogie du poète et du chien forme un conte épatant dans une langue chaude. « Quelle sorte de piéton maudit suis-je ? Quidam, badaud, pékin ? Moi, je m’imaginerais plutôt volontiers sous la forme d’un passager clandestin de la nuit en route pour nulle part ». Ce marcheur circonspect a beau ramasser des horions lorsqu’il renifle les abords de notre territoire, il incarne la figure éternelle du poète sans chaîne.
Le Chien de la Barbare suivi de
On ne récupère pas
les bicyclettes le dimanche
Dominique Joubert
Le Dilettante
93 pages, 75 FF