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Poches L’originelle sauvagerie

septembre 1998 | Le Matricule des Anges n°24 | par Thierry Guichard

Le premier recueil de l’Américian Rick Bass plonge le lecteur au cœur d’une nature originelle. Au cœur de la beauté et de la violence.

Dans les monts Loyauté

Ce qui fait le charme indéniable des nouvelles de Rick Bass émarge probablement au registre de l’exotisme. Voilà un recueil placé sous l’égide de Jim Harrison et Tom McGuane. Parrainage justifié. Dans les monts Loyauté se lit avec une fièvre d’affamé. Chaque nouvelle dont l’écriture semble dépouillée au point que les phrases sont finalement simples, pauvres même, plonge le lecteur dans un univers sauvage, au cœur d’une nature dont l’immensité jaillit des pages du recueil. L’exotisme devant les wapitis, les grizzly, les lacs glacés au mois d’août, les fêtes de hameaux que l’on quitte, skis au pieds, tiré par une voiture au cœur de la nuit ; cet exotisme est d’autant plus fort qu’il semble partagé par les narrateurs de ces récits écologiques. Ces derniers portent un regard toujours curieux, souvent émerveillé sur la nature qui les entoure. Ils ne sont pas sauvages au cœur du sauvage ; ils restent d’une humanité fragile, d’autant plus fragile qu’ils sont souvent victimes d’une nostalgie amoureuse. A ce titre, la plus belle réussite du recueil, Incendies relate tout à la fois le dégel de la montagne et celui du cœur du narrateur. Ce dernier vit seul, dans son chalet montagneux jusqu’à l’arrivée de Glenda, championne de course à pied venue s’entraîner dans cet écrin de verdure. Le narrateur est chargé par le frère de Glenda d’accompagner à vélo la jeune fille dans ses courses folles à cause du danger que représentent les ours. Courses en montagne, dans l’été qui fait reculer chaque jour un peu plus la limite des neiges mais où, chaque nuit, les lacs reconstituent la glace fondue au soleil. Glenda est belle et prend l’habitude, la course achevée, la sueur marquant son maillot et collant ses cheveux blonds, de tremper ses jambes dans l’eau glacée du lac, de s’allonger torse nu sur la glace et de poser la main de son partenaire de course sur sa poitrine. Les jours passent, le rituel s’instaure. « C’était une certitude ; il y avait entre nous une merveilleuse retenue. »
Ce bonheur insoutenable, la présence féminine dans le quotidien du jeune homme, les silences, le non-dit : Rick Bass nous touche avec cette délicatesse qui fait penser à l’art d’un Eric Holder dans La Belle Jardinière (Le Dilettante).
Mais il n’y a pas que les bonheurs simples, comme s’asseoir la nuit sur le toit d’un chalet pour regarder les incendies maîtrisés, comme flotter immobile sous les étoiles à la surface d’un lac, dormir sur un rocking-chair hissé sur le plateau d’une camionnette lancée à toute allure dans la nuit, imaginer la femme qu’on aime « en train de boire le thé« et »en savourer le goût rafraîchissant ». Rick Bass glisse presque toujours une contre note de violence ou de menace. Ici, ce sont les truies sauvages, véritables monstres qui sèment la terreur. Là, c’est le cœur froid d’un lac dont le fond héberge peut-être le corps d’un boxeur qui, dans son entraînement, avait l’habitude de le traverser, des poids aux pieds et aux bras. Ailleurs c’est le regard fou qu’un amoureux éconduit lance à son rival, dans la nuit sauvage. Avec ses phrases courtes où revient sans cesse le simple verbe être, l’immense beauté des paysages et la soudaine violence, dans leur confrontation, produisent cette énergie qui pousse le lecteur, comme Glenda au cœur de la montagne, à courir le long de ce recueil vivifiant. On en sort avec la nécessité, vite, de retrouver en nous cette nature disparue et qui manque à nos vies.

Dans les monts Loyauté
Rick Bass

Traduit de l’américain
par Pierre-Edmond Robert
10/18
191 pages, 38 FF

L’originelle sauvagerie Par Thierry Guichard
Le Matricule des Anges n°24 , septembre 1998.
LMDA PDF n°24
4,00