22h 20. Bianca fait pipi mais n’arrive pas à faire caca. 22h 27. Toujours pas, malgré un suppositoire à la glycérine. 22 h 28. Bianca tire la chasse. Ce n’est pas grave, pense-t-elle, je prendrai une dragée Fuca, et je ferai caca demain matin.« Contrairement aux apparences, ces propos captivants ne sont pas extraits de Oui-oui et la cuvette magique mais du deuxième ouvrage de Bessora. Au fil de cette acmé de crétinerie, l’auteur tisse laborieusement ce qui lui semble être une subversive et cocasse critique sociale.
Calquant si scolairement ses multiples trames narratives sur les poncifs du néoréalisme (surtout lors d’une interminable généalogie des personnages) et du roman noir que le résultat n’en est que plus pitoyable. Avec pour toile de fond une incompréhensible saga familiale congolaise, Les Taches d’encre se résument à un creuset de potacheries des plus pathétiques. Peuplé de personnages aux noms irrésistibles (Bernard et Bianca, Papi Brossard…), cet édifiant ouvrage fait se croiser une hystérique vouant un culte sans borne au dentifrice et au gel W.-C., une voyante esseulée, un schizophrène repenti, un agent d’assurances serial killer et moult dépressifs houellebecquiens, dont le racisme ordinaire s’exprime dans la consommation de »têtes de nègres« au goûter. Entrecoupées de »gingle pub« atterrants ( »Vous voulez gagner au Quinté à la Bourse, aux Présidentielles ? Écoutez les pronostics de Monsieur Sûr, tous les jours à 11h 53 sur Europe3« ), les situations affligeantes se succèdent. Bernard se masturbe sur le trône récuré par les bons soins de son épouse, cette dernière croyant qu’il a une liaison l’entraîne à une réunion de »l’Amour Pur« où l’on tente de le convaincre de renoncer à l’adultère : »(…) Vous n’avez pas le droit d’être amoureux d’une maîtresse. Et de mes waters ? Se demande Bernard.« La quatrième de couverture stipule que l’auteur »prépare actuellement un doctorat en anthropologie". Il semblerait que lors de la rédaction de cette étude socioculturelle elle a malencontreusement confondu Lévi-Strauss avec Vincent Lagaf’.
Les Taches d’encre
Bessora
Le Serpent à plumes
283 pages, 99 FF
Domaine français Bavures de potache
septembre 2000 | Le Matricule des Anges n°32
| par
Nathalie Dalain
Un livre
Bavures de potache
Par
Nathalie Dalain
Le Matricule des Anges n°32
, septembre 2000.