La lettre de diffusion

Votre panier

Le panier est vide.

Nous contacter

Le Matricule des Anges
ZA Loup à Loup 83570 Cotignac
tel ‭04 94 80 99 64‬
lmda@lmda.net

Connectez-vous avec les anges

Vous n'êtes actuellement pas identifié. Pour pouvoir commander un numéro, un abonnement ou bien profiter, en tant qu'abonné, des archives en ligne, vous devez vous connecter avec votre compte.

Retrouver un compte

Vous avez un compte mais vous ne souvenez plus du mot de passe ? Vous êtes abonné-e mais vous vous connectez pour la première fois ? Vous avez déjà créé un compte, peut-être, vous ne savez plus trop ?

Créer un nouveau compte

Vous inscrire sur ce site Identifiants personnels

Indiquez ici votre nom et votre adresse email. Votre identifiant personnel vous parviendra rapidement, par courrier électronique.

Informations personnelles

Pas encore de compte?
Soyez un ange, abonnez-vous!

Vous ne savez pas comment vous connecter?

Histoire littéraire Le méconnu capital

novembre 2006 | Le Matricule des Anges n°78 | par Anthony Dufraisse

Grand écrivain, Henri Thomas est quelque peu oublié. Cette monographie jette un nouvel éclairage sur l’homme et son œuvre.

1956, prix Sainte Beuve. 1960, prix Médicis. L’année suivante, en 61, prix Fémina. 1986, Grand prix de poésie de l’Académie française. Prix Supervielle, Grand prix de la Société des Gens de Lettres et prix Novembre pour la seule année 1992… On n’en finirait pas d’énumérer les distinctions reçues par Henri Thomas (1912-1993). Il aura fait partie de ces écrivains qu’on récompense de leur vivant, qu’on distingue, qu’on décore, pour, la mort venue, les mieux oublier. Aussi prestigieux soit-il, aucun prix n’assure contre l’oubli. Au reste, Henri Thomas se serait sans doute bien passé de tant d’honneurs et de gratifications, lui qui écrivait à Jean Paulhan, dans une lettre de 1943 : « Je crois que le véritable écrivain est un homme qui fait effort pour se passer d’être connu ». Voilà qui est bien dans le genre du bonhomme. Rien ne vaut une certaine discrétion, un certain effacement, on en est que plus libre de ses agissements. À l’époque, Henri Thomas a sûrement gagné à sa cause quelques lecteurs, attendu que comme disait Céline, « les rotatives profitent » toujours des prix littéraires mais après ? Aujourd’hui lit-on encore Thomas ? Éclectique s’il en fut, son œuvre qui se compose de romans, de poésies, de nouvelles, de récits, de traductions, de chroniques et de bien d’autres choses encore, se trouve bizarrement frappée d’une « étrange défaveur ». C’est ce que dit à raison Maxime Caron, qui le côtoya les quinze dernières années de sa vie. D’abord ils avaient correspondu, puis s’étaient rencontrés pour apprécier davantage leurs communes affinités. Et si Maxime Caron lui consacre à cette heure une monographie, c’est bien parce qu’il ne parvient toujours pas à s’expliquer que Thomas figure « parmi les écrivains du 20e siècle à ce point méconnus ». « Méconnu capital », va-t-il même jusqu’à écrire. S’il faut qualifier son œuvre, qu’en dire alors ? Écoutons Caron : « Dans l’univers mis à jour par Henri Thomas avec les mots les plus simples, l’on trouve une sorte de mariage du poétique et du philosophique qui lui appartient en propre dans la littérature française ». Qui lit Henri Thomas assiste effectivement à ce genre de noces. Il n’est que d’ouvrir au hasard Le Promontoire (1961), le plus connu de ses livres certainement, pour s’en convaincre. Il y a, chez lui, cette simplicité profonde que seule, peut-être, permet la langue française, pour qui en possède toutes les ressources. Sans doute Thomas est-il un écrivain de la subtilité, ce juste milieu entre la simplicité d’expression et la profondeur de la pensée. D’un mot, on a évoqué plus haut l’éclectisme de l’œuvre thomasienne. À ce propos, on s’en voudrait vraiment de ne pas parler des carnets qui furent pour Henri Thomas de véritables compagnons de route. Cette monographie en donne à lire un très (un trop) court extrait. Heureusement, on peut en lire ailleurs*. Pourquoi formuler ce regret de n’en pas lire davantage ici ? Tout simplement parce que c’est là que Thomas se découvre le mieux ; c’est là que se donne à voir pleinement la grâce de son écriture, pour reprendre un mot cher à Marcel Arland. Dans ses carnets comme dans ses autres livres, Thomas aura brodé autour de ces petites choses vues et vécues qui ne sont jamais que les vraies choses de la vie. Rien de spectaculaire dans cette littérature. L’anecdote, l’incident, le passager ou l’éphémère y tiennent seuls les beaux rôles. Petites choses par où se laisse parfois entrevoir l’humain dans l’homme, cette part qui nous est commune.
Henri Thomas était donc de ces écrivains qui se tiennent à hauteur d’homme, trop peu habile à courir la postérité et ses places d’honneur. En ces pages d’hommage, Maxime Caron ravive admirablement le souvenir de celui qui, comme Armand Robin, Calet, Perros ou Gadenne n’est peut-être pas suffisamment lu. Il faut dès lors la fidélité de quelques hommes, leur dévouement, tel celui de Caron, pour que se réveille enfin, un peu, la mémoire.

* Carnets inédits, Gallimard, « Les Cahiers de la NRF » (2006)

Henri Thomas
Maxime Caron
La Part commune
255 pages, 15

Le méconnu capital Par Anthony Dufraisse
Le Matricule des Anges n°78 , novembre 2006.
LMDA papier n°78
6,50 
LMDA PDF n°78
4,00