Ceux qui ne connaissent d’Alexandre Vialatte (1901-1971) que les fameuses chroniques qu’il a données au quotidien auvergnat La Montagne de 1952 à 1971 seront sans doute déconcertés par ce récit dont l’écriture rappelle souvent celle d’un Léon-Paul Fargue ou d’un Valéry Larbaud. Tout juste réussiront-ils à retrouver, çà et là, non pas sa verve inimitable, mais son goût pour la formule : « La femme de province est devenue depuis ce temps un monsieur avec lequel il faut parfois compter ».
Vraisemblablement rédigé au début des années 1930, ce récit posthume plante ses personnages, adolescents pour l’essentiel, dans les heures sombres de la Grande Guerre, laquelle n’apparaît vraiment qu’en toile de fond, sans charrier son lot de cadavres (lorsque les Américains foulent enfin le sol français, on sent moins que c’est pour le salut de la France que pour étourdir des adolescentes avides de sensations fortes). Et que fait au juste cette jeunesse désœuvrée ? Elle s’occupe comme elle peut, se nourrissant de ces petits riens que seul l’enthousiasme de l’âge sait transformer en événements.
C’est surtout par sa fraîcheur que Fred et Bérénice a de quoi séduire : le lecteur trouvera ici des pages pleines d’une jeunesse à la fois frivole et grave, encore éprise de pureté et d’actions magnifiques, passant le plus clair de son temps quelque part entre les rêves qui la portent et le désenchantement qui l’attend.
Fred et Bérénice d’Alexandre Vialatte
Éditions du Rocher, 156 pages, 14,90 €
Histoire littéraire Les ados de Vialatte
janvier 2008 | Le Matricule des Anges n°89
| par
Didier Garcia
Un livre
Les ados de Vialatte
Par
Didier Garcia
Le Matricule des Anges n°89
, janvier 2008.