Étonnant de constater combien parler du risque aujourd’hui, dans notre société ultra-sécurisée, prend des airs de provocation. C’est un sujet brûlant, au cœur de notre actualité. La pièce démarre par des « Instructions aux baby-sitters en temps de paix ». Un chœur proclame un concentré de mises en garde, conseils, modes d’emploi autour d’objets ou d’actes susceptibles de causer des risques mortels pour les bébés. La liste est longue, forcément et nous plonge dans nos prisons mentales. Ensuite, le lecteur découvre des condensés de vie avec plusieurs séquences de chœur, des voix. Il suit plus particulièrement cinq personnages qui ont tous un rapport au risque différent. Il y a celui qui risque gros, celui pour qui sortir de son appartement représente un risque majeur, celle qui surmonte sa peur du risque, celui qui apprend à se connaître par le risque et celle qui choisit entre le risque physique et le risque identitaire. Pour ces cinq-là, la prise de risque se passe le plus souvent au moment de l’adolescence, crée de la violence et une bascule radicale. Le risque serait presque vécu comme une façon de vivre des émotions que la société ou la famille refuse, une manière d’être en marge, en révolte, différent.
Risque est une matière chorale. La pièce est construite comme un reportage poétique, comprenant une succession de témoignages. L’écriture est tendue. De nombreux passages sont percutants. Et pourtant la pièce dans son ensemble apparaît plus comme un matériau impressionniste, ouvert. Une voix conclut : « Nous luttons contre ce sentiment du vide / Nous nous jetons dans la vie / Nous transformons le vertige en chute libre. » Risque ressemble à une chorégraphie sonore et visuelle, de trajectoires humaines entre chutes et rebonds.
Risque
John Retallack
Traduit de l’anglais par Isabelle Famchon
Les Solitaires intempestifs, 62 pages, 10 €
Théâtre Risque
mars 2009 | Le Matricule des Anges n°101
| par
Laurence Cazaux
Un livre
Risque
Par
Laurence Cazaux
Le Matricule des Anges n°101
, mars 2009.