Revoir Marceau est le récit d’une quête, qui doit conduire le narrateur à retrouver sa compagne, partie en le laissant enfermé dans sa maison de campagne familiale, au fin fond de la Lozère. La scène d’ouverture dit la tonalité tragi-comique de ce premier roman : le narrateur doit sauter par la fenêtre pour sortir de chez lui. Mais ce qui semble être une prouesse se révèle être un bond de quelques centimètres. Il en sera ainsi, tout le long du récit pour ce personnage si proche d’un Charlie Chaplin, toujours à deux doigts de basculer dans le vide, sans le vouloir.
En quête d’un réseau téléphonique, son chemin croise des moutons égarés. Il apprendra que le berger est mort voilà plusieurs mois, mais observe au fil du temps que les bêtes semblent s’adapter à leur condition de troupeau sans maître. Il alterne ses tentatives pour joindre Marceau, qui reste muette, avec d’interminables apéritifs chez Pierre, agriculteur abandonné par sa femme et ses enfants. Notre héros décide de ne pas s’attarder et de rejoindre Paris. Avec comme chauffeur le curé du village, féru de musculation. Malgré ses aveux sur son apathie naturelle, son penchant pour un certain laisser-faire, à l’anglaise, jamais le récit ne s’assoupit. Les personnages et les scènes qui vont égrener ce parcours vers Marceau sont terriblement bien campés, photographiés : du village, à Mende, face à une gare fermée, à l’hôtel, au train qui s’arrêtera en pleine voie… Ce leitmotiv de la trajectoire, et des choix à faire face aux embranchements, se met en place sans atermoiement. L’errance ici prend son temps : si revoir Marceau semble être le but final, les divagations elles ne sont pas écrites à l’avance. Il s’agit plutôt de rechercher « l’impression magnifique et effrayante de se retrouver enfin hors du chemin principal, ailleurs. » Romain Meynier nous la fait vivre, jusqu’à la fin, jusqu’à la dernière porte close.
Virginie Mailles Viard
Revoir Marceau de Romain Meynier
Cambourakis, 102 pages, 15 €
Domaine français Revoir Marceau
octobre 2017 | Le Matricule des Anges n°187
| par
Virginie Mailles Viard
Un livre
Le Matricule des Anges n°187
, octobre 2017.