La lettre de diffusion

Votre panier

Le panier est vide.

Nous contacter

Le Matricule des Anges
ZA Loup à Loup 83570 Cotignac
tel ‭04 94 80 99 64‬
lmda@lmda.net

Connectez-vous avec les anges

Vous n'êtes actuellement pas identifié. Pour pouvoir commander un numéro, un abonnement ou bien profiter, en tant qu'abonné, des archives en ligne, vous devez vous connecter avec votre compte.

Retrouver un compte

Vous avez un compte mais vous ne souvenez plus du mot de passe ? Vous êtes abonné-e mais vous vous connectez pour la première fois ? Vous avez déjà créé un compte, peut-être, vous ne savez plus trop ?

Créer un nouveau compte

Vous inscrire sur ce site Identifiants personnels

Indiquez ici votre nom et votre adresse email. Votre identifiant personnel vous parviendra rapidement, par courrier électronique.

Informations personnelles

Pas encore de compte?
Soyez un ange, abonnez-vous!

Vous ne savez pas comment vous connecter?

En grande surface Perlimpinpin

novembre 2017 | Le Matricule des Anges n°188 | par Pierre Mondot

Difficile de s’illustrer quand on s’appelle Besson. La joie d’atteindre la renommée se double du dépit de devoir en partager les trompettes avec une poignée d’homonymes. Certes, on ne vous ignore plus, mais pire, on vous confond. Avec Luc, producteur de films hollywoodiens tournés en Seine-Saint-Denis, avec Patrick, vieil écrivain prometteur, ou encore avec Éric, traître. Puis les Tesson, les Buisson viennent ajouter au trouble. Comment dès lors se hisser au premier rang des suggestions dans les moteurs de recherche ?
Une possibilité : se rapprocher du pouvoir. Aussi, Philippe, l’écrivain (l’autre) a-t-il choisi de suivre Emmanuel Macron au long de sa campagne, afin de rendre compte de cette équipée dans un livre : Un personnage de roman. L’exercice est connu désormais : Yasmina Reza l’initia avec Nicolas Sarkozy. La dramaturge s’émerveillait de retrouver dans l’homme politique la sauvagerie policée, la virilité inquiète de ses personnages. En consignait avec jubilation les fulgurances : « Je vais vous faire sursauter, je ne crois pas que Dick Rivers soit un naze ».
De ce Besson-là, Wikipédia nous apprend qu’il a adopté un « style dépouillé (…) fortement inspiré de l’œuvre de Marguerite Duras ». Qu’il fut durant cinq années le bras droit de Laurence Parisot. Enfin, qu’un simple versement de deux euros par personne garantirait la pérennité de l’encyclopédie en ligne.
Le récit se présente comme un journal composé sur le vif et nourri au jour le jour des impressions de l’auteur. Assez vite pourtant, la forme semble suspecte. Avec par exemple l’emploi anachronique du mot remontada, dont Besson use pour désigner la victoire surprise de Fillon aux primaires de son parti, quand l’expression n’est attestée dans la presse que six mois plus tard, lors de la désintégration du club parisien en Catalogne. La prise de conscience de cet entre-deux énonciatif brouille ensuite la lecture. Ce faux vrai rappelle ces résumés d’affrontements sportifs commentés en simulant les conditions du direct. « Oh, sur le poteau ! » braille le journaliste dans sa cabine de montage, le match terminé. « Et Bayrou se rallia ! » sursaute le romancier six mois plus tard, dans le calme de son bureau.
Un second trouble provient de la relation entre les deux hommes. L’auteur minimise au début les liens qui l’unissent au candidat – rebaptisé Emmanuel M. dans le texte, conformément à l’exigence de dépouillement durassien indiqué plus haut : « Je le connais depuis deux ans, (…) nous avons sympathisé, nous nous voyons de loin en loin, il nous arrive d’échanger des SMS… »
Mais très vite il apparaît que le candidat et son épouse ne peuvent plus se passer de lui. Ainsi, au mois d’avril, tandis qu’ils s’accordent quelques jours de repos (« le secret, c’est de s’aménager des parenthèses » a confié le futur président), le pseudo-diariste note : « C’est de la terrasse où ils prennent leur petit-déjeuner qu’ils m’appellent ».
La dépendance du couple s’explique sans doute par l’exceptionnelle pénétration de l’écrivain. Ainsi, lorsqu’il visite le nouvel appart de Manu et découvre dans le bureau le panorama offert sur la Tour Eiffel : « voilà un garçon qui aime les vues, décidément, les perspectives, le lointain ». On frôle le mentalisme. Puis, alors que son ami s’émeut à l’annonce du retrait de François H. : « j’ai la confirmation que sous l’armure, se dissimule, formulons-le ainsi, un sentimental ».
Parfois, il s’enhardit. Réalisant que les initiales du mouvement En marche ! correspondent à celle de son fondateur, il ose : « Ne serait-ce pas un peu de mégalomanie ? » Mais lorsqu’il apprend qu’Emmanuel, après avoir annoncé sa candidature, « a demandé à passer au pied de la Basilique de Saint-Denis, nécropole des rois de France », plutôt que d’alourdir son enquête en relançant la question de la santé mentale de son poulain, Besson choisit l’interrogation métaphysique : est-il venu « se remémorer que le temps et la mort forment l’essentiel ? »
L’amitié des deux hommes tient à ce que chacun se reconnaît et se complaît dans le narcissisme de l’autre. Mais rien n’est plus ennuyeux que les gens qui s’admirent. En conclusion, Macron est comparé à un « sphinx », avec « une part irréductible de mystère ». Bon. Le collier dont je suis attaché / De ce que vous voyez est peut-être la cause.
Sous la plume de Besson, Emmanuel M. devient un héros de conte. Dans son berceau, les fées Sofres et Ipsos déposent des bottes de sept lieues. Un communicant habile l’élève au rang de marquis de Carabas. La sorcière effrayée fuit aux confins du royaume.

Pierre Mondot

Perlimpinpin Par Pierre Mondot
Le Matricule des Anges n°188 , novembre 2017.
LMDA papier n°188
6,50 
LMDA PDF n°188
4,00