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Domaine étranger Shakespeariennes retrouvailles

février 2019 | Le Matricule des Anges n°200 | par Éric Dussert

La romancière Jeanette Winterson publie un nouvel opus très attendu après cinq ans de silence : abandon toujours, filiation encore…

La parution d’un nouveau roman de Jeanette Winterson n’est pas un épisode bénin de la vie littéraire. La romancière britannique est parcimonieuse, mais ses lectrices et lecteurs sont si convaincus depuis ses premiers livres qu’elle ne pouvait décemment les faire attendre beaucoup plus. On devine du reste que La Faille du temps va prendre des allures d’événement. Le roman va être lu avec componction et, c’est à craindre, un horizon d’attente très élevé. C’est très explicable car cinq ans nous séparent de La Passion chez L’Olivier en 2013. Cinq ans de patience et de relectures qui donnent finalement beaucoup d’à-propos au titre de ce nouvel opus, La Faille du temps, un roman qui, sans en dévoiler tout le mystère, brode sur Le Conte d’hiver de Shakespeare, une fable des origines et des destins comme Winterson aime nous les proposer. Cette fois avec le concours du maître des scènes, Shakespeare lui-même, et non plus Stevenson comme c’était le cas dans Garder la flamme (Melville, 2006) : « Le Conte d’hiver revisite Othello. Un homme qui préfère assassiner le monde plutôt que de changer. Si ce n’est que cette fois, l’héroïne n’a pas besoin de mourir pour assouvir les délires du héros. En fait, c’est lui-même qu’Othello est incapable d’aimer et de croire – pas Desdémone –, mais quand Shakespeare revient sur ce thème, il y ajoute la possibilité d’une seconde chance. »
Après l’enchaînement des drames mortels initiaux, plus personne ne meurt non plus chez Jeanette Winterson et l’on assiste à la mise en place de l’une des trois fins possibles pour une tragédie : « Vengeance. Tragédie. Pardon. Shakespeare était un fin connaisseur de la vengeance et de la tragédie. Vers la fin de sa vie, il s’est intéressé au pardon – ou disons plutôt qu’il y est revenu. » Entrecroisant les destins d’un bébé (Perdita), de son père Leo, financier odieux de la City, de sa mère la chanteuse MiMi, et de l’ami d’enfance de Leo, Xeno, personnage plutôt détendu – il est créateur de jeux vidéo poétiques à base d’anges –, Jeanette Winterson raconte la jalousie du père et l’éloignement de l’enfant qu’il soupçonne être le fruit de l’adultère de MiMi et Xeno. Les années passent, la question de la filiation jaillit, comme toujours chez Winterson, enfant adoptée elle-même. C’est un trait fondamental de son existence qu’elle évoque depuis Les Oranges ne sont pas les seuls fruits (Des Femmes, 1991), ce roman autobiographique où elle racontait sa jeunesse de petite fille admise dans une famille très pieuse, son adolescence et ses premières amours homosexuelles. La quête d’identité traverse aussi Pourquoi être heureux quand on peut être normal ? (L’Olivier, 2012) dont le titre est à lui tout seul un chef-d’œuvre et un hommage aux femmes et aux jeunes filles issues du prolétariat anglais.
Mais Le Conte d’hiver est une tragicomédie : on en sort soulagé et sensible aux efforts de la romancière pour insuffler sourire et modernité au mythe ancien. « Bref, tout ça ne serait pas arrivé si on n’avait inventé le rond-point plus tôt », lance l’un de ses personnages à propos d’Œdipe. Comment lui donner tort ? Les mythes traversent aisément La Faille du temps  : MiMi, qui s’était en quelque sorte changée en statue de tristesse et de dépression revient à la vie et chante pour sa fille retrouvée, pour Leo et pour Xeno. Voilà, nous explique Jeanette Winterson, « Comme dirait Ezra Pound : il faut faire du neuf. »

Éric Dussert

La Faille du temps,
de Jeannette Winterson
Traduit de l’anglais (Royaume-Uni) par Céline Leroy,
Buchet-Chastel, 320 p., 22

Shakespeariennes retrouvailles Par Éric Dussert
Le Matricule des Anges n°200 , février 2019.
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