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Domaine français La belle au bois parlant

juillet 2020 | Le Matricule des Anges n°215 | par Guillaume Contré

Pascale Petit a écrit un curieux manuel pour princesses mélancoliques, une théorie des contes dont les fées ont volé la clé.

Dans un casse-tête habituel, il n’existe rien d’autre que ce qui est énoncé dans la présentation dudit casse-tête. » Cette phrase sibylline pourrait servir de métaphore générale de ce livre étrange et inclassable. L’Audace n’est ni un roman, ni un texte poétique, ni un essai, ni un conte de fées. C’est tout cela à la fois, un casse-tête en forme de montage capricieux, élégant, ironique, qui, en une centaine d’entrées aux titres faussement programmatiques (comme si les proverbiales miettes de pain du Petit Poucet ne conduisaient qu’à de fausses pistes), offre au lecteur une poétique des « rapprochements surprenants ». Pascale Petit qui, comme l’indique le texte en quatrième de couverture, « aime mixer/transformer les genres qu’elle aborde », cherche-t-elle à balader son lecteur jusqu’à lui donner le tournis ? Il y a de ça, certainement, un jeu tour à tour plaisant et inquiétant, dont les règles ont été scrupuleusement escamotées. Il s’agit alors de proposer « ces sortes d’évidences » qui n’en sont pas. On y comprend tout et tout s’échappe. La marque que laisse la lecture est durable et évanescente.
On ne sait pas trop qui parle, ici, qui est ce « je » qui joue au chat et attrape le lecteur comme une souris. « Tu brilles », dit la voix, en parlant de et à son lecteur, qu’elle définit aussitôt comme « une absence ». Il y a donc comme un vide à combler, à moins qu’il ne s’agisse de tourner autour (mais pas autour du pot). Qui est-elle, d’ailleurs, cette voix d’autorité, à défaut d’être celle de l’auteure (ou l’inverse) ? S’agit-il de la Belle au bois dormant échappée d’un conte ? À moins que ce ne soit le lecteur qui s’y retrouve coincé, dans le conte, ou qu’il soit lui-même le prince charmant venu réveiller la princesse. Ou peut-être ne s’agit-il pas tant d’un prince ou d’une princesse que de principes (féminins et masculins).
Il y a, en réalité, des règles du jeu, des demi-vérités, des équations, des aphorismes, des banalités du savoir populaire élevées au rang de koans zen : « Bleu lavande, rose guimauve = je me languis » ; « Les pierres sont philosophales » ; « Les échecs sont programmés » ; « La mélancolie est automnale » ; etc. Ici, certainement, « l’ironie discrète est une recherche sérieuse » et « les plaisirs héliconiques aussi ». De toute façon, « une chambre d’hôtel sur la Lune vaut mille mots ».
L’Audace est de ce genre de textes qui se présentent aux lecteurs comme un exercice en théorie poétique, dans lequel la poésie fait déborder la théorie pour la convertir, justement, en poésie, car « l’étrangeté de la scène s’en trouve augmentée ». Le genre de textes où « il y a souvent quelque chose de trop et un ailleurs hors de portée du cadre ». « Une suite d’aventures interactives » où les beautés sont éphémères sans pour autant qu’elles ne fanent. C’est de la beauté des phrases, ce beau souci, dont il question, à ceci près que « les mots ne correspondent plus » et que la narratrice en a fait « le programme de (s)on existence ». Alors, forcément, on s’interroge : « Est-ce que les escargots qui n’aiment pas les sentiers battus vont plus ou moins vite que les autres ? Est-il exact que les licornes vivent à 75 % au pied des arcs-en-ciel ? »
Ce qui, sous des mains moins habiles, celles dont les jeux sont toujours vilains, pourrait sembler vain, une dérive ne menant nulle part – reste à savoir où mènent les dérives trop sûres de leurs cheminements –, fait ici de nous, les éternels lecteurs, « les sujets de propositions elliptiques ». La question serait alors de savoir « qu’est-ce qu’un objet de délectation ? » D’autant que « la beauté n’est pas à proprement parler dans la façon qu’on a de se montrer ni dans les étoiles d’argent qui brillent ». Ce qui n’est pas grave, puisque « personne n’ignore que les mots et les flèches sont magiques ». Dans ce livre mystérieux, « la transparence attire l’attention sur les détails ».

Guillaume Contré

L’Audace, de Pascale Petit
Nous, 112 pages, 14

La belle au bois parlant Par Guillaume Contré
Le Matricule des Anges n°215 , juillet 2020.
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