Qui est Lenka ? C’est un personnage féminin, « très pop, monté sur ressorts », que l’on peut suivre dans Le Lionceau (Gallimard) du dissident tchèque Josef Škvorecký. « J’ai juste voulu ralentir ses élans », s’amuse Guillaume Belhomme. Né en 1976 et titulaire d’une maîtrise en histoire de l’art (sur l’art néo-araméen), ce touche-à-tout est branché sur le courant alternatif. Musicien, écrivain, journaliste, éditeur, il est spécialiste de jazz, de rock et d’accords improvisés. Et gros lecteur. Ses modèles ? « Je ne serai pas bien original : Bourgois, Pauvert, Losfeld, Oswald, André Dimanche, Jérôme Martineau ». Le catalogue de Lenka lente mélange donc musique & littérature. Côté pile : John Coltrane, Thelonious Monk, Jackie McLean, un panorama de l’underground français, des curiosités comme Du piano-épave du compositeur australien Ross Bolleter. Côté face : des rééditions de courts textes (Pierre Loti, Félix Fénéon, Tristan Tzara, André Salmon, William Wordsworth, etc.) accompagnés d’un CD trois pouces. « Des textes devenus introuvables, intelligents et bien écrits », résume celui qui dirige aussi la revue Le Son du grisli, jadis blog dédié aux « bruits qui changent de l’ordinaire ». L’hiver sera bruyant – ou pas. Sont annoncés : Un homme sensible d’Octave Mirbeau, une biographie du saxophoniste Dexter Gordon, et la poésie de Lee Ranaldo, l’ex-guitariste de Sonic Youth.
Par quel désir (ou renoncement) Lenka lente, à l’origine label musical, est devenue en 2013 maison d’édition publiant des livres ?
Désir et renoncement, les deux sont liés, c’est vrai. J’ai sorti quelques disques, en tant que musicien, à partir de la fin des années 1990 et, peu à peu, ne me suis plus retrouvé dans les attentes des quelques labels qui me produisaient. J’ai alors créé Lenka lente pour continuer à composer sans plus « chercher à plaire ». Après avoir fait paraître trois disques sous cette étiquette, je suis passé à autre chose, notamment à l’écriture. J’ai collaboré à Jazz Hot, Les Inrockuptibles ou Mouvement, avant de publier en 2008 mon premier livre, un portrait du musicien de jazz Eric Dolphy aux éditions Le Mot et le Reste. Ça a été ensuite un texte plus court concernant le compositeur Morton Feldman, une anthologie de jazz en deux volumes… Et puis il m’est arrivé avec l’éditeur marseillais ce qu’il m’était arrivé plus tôt avec les labels discographiques : une certaine lassitude s’est installée, d’autant que mes intérêts, assez peu « grand public », peinaient de plus en plus à convenir aux intérêts, financiers cette fois, de l’éditeur en question. Si bien qu’en 2013, quand j’ai quitté Paris pour Nantes, j’ai pris la décision de relancer Lenka lente afin de publier cette fois des livres et des livres-disques. L’idée n’était pas seulement de sortir mes textes, mais aussi d’aller pêcher dans ma bibliothèque des œuvres que l’on trouvait difficilement en librairie, certaines accompagnées d’illustrations sonores…
Lenka lente affiche...
Éditeur Du son et des lettres
octobre 2020 | Le Matricule des Anges n°217
| par
Philippe Savary
Mêlant livres sur la musique et ouvrages de littérature, le catalogue de Lenka lente cultive la curiosité. L’édition comme un art de vivre
Un éditeur