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Une gueuse sans faux-col
Lmda N°247 Un roman comme Paris ne sait pas en faire, acide, tendre et grave. Bière belge à déguster.
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Domaine étranger Amour et pixels Alan Pauls explore non sans humour les grandeurs et décadences des relations virtuelles. Plus de détails… il n’y a d’originalité et de vérité que dans les détails », disait Stendhal, une leçon qu’Alan Pauls, lecteur subtil et francophile, a bien retenu. Ses constructions romanesques pullulent de détails, une avalanche de micropéripéties quotidiennes en apparence dérisoires, disséquées à la loupe dans de longues phrases virtuoses qui semblent obéir à une logique contradictoire de concentration et d’expansion. Chez Pauls, les...
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Domaine français Hors cadres Avec finesse, Éric Rondepierre se penche sur des images comme autant de madeleines proustiennes et de chausse-trappes baroques. Curieux petit livre, situé à la frontière – ou la lisière – de plusieurs possibilités littéraires, Exit tient à la fois de l’essai et de l’intuition poétique, de la rêverie et de la plongée dans le souvenir. Arborant le beau sous-titre de « fictions réfléchies », il offre – à travers quatre textes qui se nourrissent les uns les autres et permettent à la pensée et à la mémoire de dériver autour d’un centre flottant – une réflexion et un...
Chronique
En grande surface
En grande surface
par Pierre Mondot
Les corps caverneux
Inquiet sans doute du piètre état des nappes à la veille d’un énième été radieux, Pierre Michon rouvre les écluses et miracle, voici qu’à nouveau coule la Beune. Enfin, miracle. C’est parler vite. Ce retour bien sûr nous ravit mais. Comment dire. Difficile de contenir sa déception si l’on se remémore cette information parue dans Le Monde à l’été 2020 : l’auteur des Vies minuscules annonçait avoir achevé « un roman d’amour de plus de quatre cents pages ». Un texte « hypercontemporain », précisait-il, avec une partie de l’intrigue située en Chine mais chut je ne vous en dis pas plus. Et...
Le Matricule des Anges n°244

un auteur
Max Porter
Chronique
Traduction
Traduction
Maud Mabillard*
La Révolte, de Nikolaï Kononov
Quand j’ai entendu parler de La Révolte à Krasnoïarsk, aux débats du prix littéraire NOS où le livre était finaliste en 2019, j’ai dressé l’oreille, mais j’étais sceptique. L’histoire m’a immédiatement attirée : celle – réelle – de Sergueï Soloviev (1916-2009), qui participa à la révolte de Norilsk, l’une des rares tentatives de soulèvement de l’histoire du Goulag soviétique. En revanche, l’auteur, Nikolaï Kononov, un Moscovite de 40 ans, journaliste économique ayant écrit un livre sur Pavel Dourov (le « Mark Zuckerberg russe ») et travaillé pour Forbes, me semblait peu qualifié pour un...
Le Matricule des Anges n°242
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Domaine étranger Les mots et la mort Dans une traduction contemporaine de ses textes de jeunesse, on découvre un Peter Handke à situer quelque part entre Kafka et Robbe-Grillet, et pas très loin du Meursault de Camus. Recueil de textes de jeunesse écrits entre 1963 et 1966, paru pour la première fois en 1967 et traduit en français – par Georges-Arthur Goldschmidt – en 1986 (Christian Bourgois), Bienvenue au conseil de surveillance reparaît aujourd’hui dans une nouvelle traduction et augmenté de deux textes (21 au total). Il permet de découvrir la manière du premier Handke, un auteur à l’œuvre particulièrement protéiforme. Né en Autriche en 1942, prix...
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Poésie Cliff for ever S’il est un poète que doivent lire ceux qui ne lisent pas la poésie, c’est bien William Cliff. Mariant poésie et narration, il incarne, d’une façon désaccordée mais mélodieuse, l’homme-humain que célébrait Cingria. Poète à part, William Cliff est un « irrécupérable » dont la vie a tout d’un texte improvisé. Né il y a 82 ans, en 1940, à Gembloux, en Belgique, il écrit ce qu’il vit et vit ce qu’il dit. Son vers fait qu’on le reconnaît au premier coup. « Je crois en la française prosodie / au comput des syllabes que l’on lie / l’une à l’autre jusqu’à se retrouver / au bout d’un vers qui devrait bien rimer. » (dans Marcher au charbon, Gallimard, 1978)....
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Poches Cluster en résistance Poignant témoignage d’un lépreux et critique acerbe du biopouvoir, le récit brûlant d’une vie de combats. Sur le site d’Anacharsis, L’Ordre (1973), coréalisé par Jean-Daniel Pollet et Maurice Born, montre les bâtiments ruinés de Spinalonga, une île proche de la Crête où de 1904 à 1957 la Grèce déporta ses lépreux. Dans le film, Born rendait leurs visages et leurs voix aux derniers rescapés – des coriaces – de ce petit bagne posé sur « une mer limpide et calme, comme faite de cristal ». Epaminondas Remoundakis y fut relégué de 1936 à 1957 puis,...
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Théâtre L'écologie comme condition Théâtre/Public passe le spectacle en revue et interroge les rapports qu’il entretient avec son environnement. En 1974, Bernard Sobel, alors directeur du Théâtre de Gennevilliers, crée la revue Théâtre/Public. Une revue trimestrielle qui, comme son nom l’indique, se destine à entretenir le débat entre le théâtre, tout ce qui touche au théâtre, aussi bien dans ses choix artistiques que dans ses pratiques, et le public entendu au sens large, celui qui va ou pourrait aller au théâtre. Une revue exigeante, documentée, qui ne pratique ni les brèves ni les...
Égarés, oubliés
par Éric Dussert
Enfui des mondes
Avant Radiguet, Jean Le Roy fut le chouchou de Cocteau. Son grand talent fut brisé en 1918 au cours de l’assaut du mont Kemmel.
La commémoration du centenaire de la Première Guerre mondiale offre de redécouvrir des œuvres dont le souvenir avait été porté avec émotion par les témoins du passage sur terre de leurs jeunes auteurs. Tout au long du siècle dernier, leurs noms furent copiés de page en page, salués ici, longuement évoqués là, regrettés partout. Leurs écrits n’étaient certes pas accessibles, mais en de nombreux volumes de mémoires on évoquait René Dalize, le marin mal enterré proche d’Apollinaire, Jean Arbousset, Paul Drouot, Albert-Paul Granier, Wilfried Owen ou Ernst Stadler, etc. Grâce aux vertus...
Le Matricule des Anges n°162