Roman d’une grande lucidité sur l’amour, ses rouages et son quotidien, Le Contretemps, est paru d’abord chez Le Griot en 1993. L’auteur y retrace une histoire qui commence presque par hasard : « Le 23 octobre, j’ai embrassé Marc, parce qu’il m’a pris la main, tard le soir ». Qu’elle restitue par bribes, au gré des réminiscences de Sonia, sa narratrice. La construction du récit est à l’image de photos sorties pêle-mêle d’un tiroir de sa mémoire. Les événements et les époques s’enchevêtrent, sans pour autant en altérer la fluidité. Quels que soient les souvenirs évoqués, Sonia conserve dans son discours le regard d’amoureuse qu’elle portait alors. Les travers et roueries de Marc interpellent le lecteur, sans paraître affecter sa compagne. Ce décalage permet à Nathalie Kuperman d’effectuer une analyse intrinsèque du comportement amoureux. Elle met intelligemment en exergue l’opiniâtreté des êtres à l’abnégation et à la sublimation face à l’objet de leur passion. Ainsi que la nécessité qu’a l’homme de croire en son amour pour se sentir exister. Ce couple s’est formé inopportunément, et se déchirera de même. Mais en attendant sa perte, il se conforte dans cette illusion de vie. Sonia et Marc sortent frénétiquement, écumant les bars, restaurants et autres lieux nocturnes. Ils s’enivrent de bordeaux et de bruits. Pour ne pas songer que leur vie n’est elle-même que ce « contretemps », ils craignent les silences et redoutent l’ennui. Et quand il arrive malgré tout « sournoisement », l’effroi les gagne. Les longues parties d’échecs qui rythment leurs soirées deviennent la morbide métaphore de leurs rapports. Tout n’était donc que jeu, et devient stratégie macabre et éperdue. Des cris, des larmes et des mensonges, agencés pour remplir les cases trop vides. Tendu et épuisé, chacun cherche à poser « la date limite de (leur) amour ». « Comme deux enfants qui jouent à se faire peur », mais dont les règles leur échappent peu à peu, ils se sabordent, pour échouer au bord de la folie, e
Le Contretemps
Nathalie Kuperman
Le Serpent à Plumes
145 pages, 33 FF
Poches D’amour et de bordeaux
août 1999 | Le Matricule des Anges n°27
| par
Nathalie Dalain
Un livre
D’amour et de bordeaux
Par
Nathalie Dalain
Le Matricule des Anges n°27
, août 1999.