On n’aime pas les chats est une fable universelle grave et ironique sur le rejet et l’exclusion, un album aux multiples échos. Ici, les racistes ont la parole et disent leur haine des chats. La raison ? « Ça ne s’explique pas (…) C’est comme ça ». Les différences physiques évoquées et stigmatisées confèrent à un racisme épidermique, irrationnel où se greffent les peurs de la différence. Véritable discours sur la folie des hommes, l’album dépeint avec acuité un univers inquiétant. En plaçant le raciste au cœur de l’histoire, dans un esprit réaliste, sous la forme que lui confèrent sa bêtise infinie, ses vices et leurs conséquences, François David présente une vision infernale du monde relayée par les illustrations colorées et pleine page de Géraldine Alibeu. Face aux chats anthropomorphes se trouvent des personnages terrifiants, sans bouche, inspirés sans doute des tableaux de Jérôme Bosch, nourrissant en eux la bête immonde. Les anciens pogroms et autres déportations, auxquels certaines illustrations font référence (l’incendie de la maison du chat persécuté) sont habilement évoqués. Des menaces souvent déguisées ont raison du chat et de sa famille qui choisissent la fuite : « Ils ont mis le temps, mais désormais ils ont compris. » L’ordre tant recherché est désormais atteint et fait place à l’ennuyeuse uniformisation. Il ne faut pas s’attendre à une fin de repentir. Le racisme est insidieux et ne se résorbe pas aussi facilement : la situation se révèle donc propice… à la découverte d’un autre bouc émissaire !
Le texte simple et concis gagne en intensité et soutient l’idée de se défendre, de se déprendre du racisme ordinaire lové en chacun de nous et de se prémunir des hypocrisies : « Nous, on est pas des méchants. Aussi, on lui a laissé dix minutes. Seulement cette fois, il devait décamper ! »
On n’aime pas les chats de François David
ill. Géraldine Alibeu, Sarbacane, n. p., 14,90 €
Jeunesse Tous pareils, tous différents
juin 2006 | Le Matricule des Anges n°74
| par
Malika Person
Un livre
Tous pareils, tous différents
Par
Malika Person
Le Matricule des Anges n°74
, juin 2006.