Quand Jean-François Bourdic intègre le Cecofop en 2004, formation qui préparait aux métiers du livre, on lui demande de se présenter. Il se prête à l’exercice, non sans malice : « J’ai répondu que j’avais été libraire, fleuriste, prof de plongée, puis père Noël chez Auchan ». Si le dernier emploi n’était pas vrai, aujourd’hui ça l’est devenu : depuis huit mois il s’occupe de la diffusion de Gallimard dans les hypermarchés. Atypique parcours que celui de ce Parisien, à l’esprit volontiers curieux, qui étudia les rapports entre l’histoire et le cinéma à la Sorbonne, collabora à un fanzine rock (Abus dangereux), vendit des livres (chez Fontaine et Brentano’s) ou des bouquets composés, et arpenta les rivages ensoleillés du monde entier. La grande évasion dura sept ans. « On voulait changer d’air. On passait huit mois dans un pays, puis on allait voir ailleurs. » Au gré des aléas climatiques et salariés. Jean-François et sa compagne Virginie séjourneront ainsi au Mexique, en Thaïlande, en Indonésie, aux Seychelles, en Egypte, au Honduras, ou encore à Haïti« (…) C’est sûrement le seul endroit au monde où sur une plage abandonnée tu trouves un panneau sur lequel est inscrite une citation du poète cubain Nicolas Guillén en trois langues, l’espagnol, le français et le créole. » Après leur périple sous les tropiques, retour en France (« la plongée sous-marine, ça use ») la veille d’un certain 21 avril 2002 (« on a failli refaire nos valises »). Avec l’idée de réaliser « un projet personnel ». Fort de son expérience, Bourdic cherche à créer une librairie de voyage centrée sur la littérature et les beaux-arts, tente de racheter la Librairie espagnole à Bordeaux. En vain. Il s’initie alors à l’édition au Cecofop de Nantes. « J’ai suivi cette formation plus par curiosité. Je voulais savoir pourquoi tant de livres arrivaient en librairie », dit-il dans un sourire. Après un stage aux éditions Cénomane d’Alain Mala, « c’était enrichissant, parce que tu fais tout de A à Z », il poursuit son apprentissage chez Actes Sud, au service cessions de droits. Mauvais et courts souvenirs. « Ça a juste avancé l’échéance. » Avec 15 000 € d’apports personnels, entouré de Virginie Girard, traductrice pour le compte d’une compagnie d’assurances, et Vincent Mens, un collègue libraire, Bourdic crée sa propre structure début 2007.
Dans son catalogue naissant, ouvert aux romans, aux nouvelles, aux essais, Les Fondeurs de briques accueille des voix discordantes, décalées, rebelles au conformisme, marquées par le cosmopolitisme et l’exil. Le récit-enquête de Jonah Raskin autour de l’œuvre de l’insaisissable et éternel révolté B. Traven pourrait faire office de manifeste. C’est également vrai pour l’iconoclaste Yegg, l’unique livre de Jack Black (préfacé par Burroughs), autoportrait d’un hobo dont on suit les pérégrinations criminelles dans l’Ouest américain du début du XXe siècle en compagnie de voleurs magnifiques et inventifs.
Les Fondeurs de briques, titre emprunté...
Éditeur Épris de liberté
Basé à Arles, Les Fondeurs de briques est une jeune maison d’édition qui propose des traductions inédites d’auteurs hispaniques et anglo-saxons, souvent méconnus du lecteur français. Des textes iconoclastes, engagés, qui se confrontent aux réalités de leur temps.