Littérature et traduction : le goût de l'étranger
- Présentation Le désir de l’autre
- Autre papier Embarcadère pour l’ailleurs
- Autre papier Chambre avec vue
- Autre papier Une communauté polyglotte
- Autre papier L’heure de se rencontrer
- Entretien La Grèce au cœur
- Entretien Veni, vidi, traduci
- Entretien Au cœur de la traduction
- Entretien « L’épreuve du son »
- Autre papier Une langue singularisée
Au cœur d’Arles, l’Espace Van Gogh héberge depuis 1989 le Collège international des traducteurs littéraires et l’association ATLAS qui le gère. Ici, près de 700 m2 de l’Ancien Hôtel Dieu s’offrent au visiteur. Au premier étage, la bibliothèque et ses 18 000 livres ne laissent que peu de place aux bureaux et à une petite cour intérieure. Au deuxième étage, dix chambres accueillent les résidents venus du monde entier. Un salon, une cuisine, une salle de gymnastique et une terrasse forment les parties communes. Prêté par la ville d’Arles, le bâtiment offre un véritable confort aux résidents comme au public invité cet automne aux 34e Assises de la traduction littéraire qui accueillaient, entre autres, le philosophe François Jullien, le poète et traducteur Jean-Yves Masson, les écrivains Frédéric Boyer et Boubacar Boris Diop.
Avant de prendre la direction du Collège en 2009, Jörn Cambreleng a officié dans le théâtre comme acteur, musicien, metteur en scène, et a traduit notamment des pièces de Schiller, Wedekind, Jelinek, Fassbinder, la romancière Juli Zeh et des essais de Walter Benjamin. Il a dirigé l’École supérieure de théâtre de Bordeaux-Aquitaine.
Jörn Cambreleng, comment fonctionnent les résidences du Collège ?
Il faut être en contrat avec un éditeur pour postuler, et s’il y a de la place on est accueilli pour une période allant de quinze jours à deux mois et demi. Les traducteurs peuvent bénéficier d’une bourse : celles du CNL ou d’organismes étrangers ou celle que nous offrons sur notre budget (600 000 € en tout), hélas en diminution. Pour certaines résidences, on demande une contribution. Traduire est un métier extrêmement solitaire et on peut avoir besoin de sortir de son face à face avec l’ordinateur pour rencontrer d’autres traducteurs. Le lieu permet cette convivialité. Mais on peut vouloir l’inverse : s’isoler de son quotidien et se concentrer sur son travail. Le lieu peut être un monastère ou un carrefour de rencontres. 70 % des 120 traducteurs que l’on reçoit par an travaillent du français vers leur langue. Ils viennent ici pour reprendre un contact vivant avec la langue, s’y immerger.
Vous formez aussi à la traduction…
Oui : pour les professionnels, pour ceux qui finissent un cycle d’étude et pour le grand public. Une fois par mois, on propose un atelier « traducteur d’un jour » au grand public. On fournit un mot à mot d’un texte dont il n’est pas nécessaire de pratiquer la langue d’origine et on joue avec le français, on en explore les possibilités. Ainsi, durant deux heures, on fait toucher du doigt le fait que le travail du traducteur est essentiellement un travail sur la langue française et un travail de création littéraire. À terme, ça diffuse dans le lectorat une culture de la traduction.
Les ateliers de professionnalisation permettent à des gens en fin d’études de mettre les deux pieds dans le métier en leur fournissant un réseau de relations et en les accompagnant pendant...