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Domaine étranger L’échiquier de l’Histoire

mars 1997 | Le Matricule des Anges n°19 | par Thierry Guichard

Musicien, historien et écrivain, le Sévillan Rodrigo de Zayas a composé une tétralogie monumentale et érudite. Contre toutes les inquisitions.

Ce nom sans écho, T.1 : Brigue et le talion

Ce nom sans écho, T.2 : Les Faussaires

Ce nom sans écho, T.3 : Shéol

Comment considérer les trois premiers volumes de la tétralogie, Ce Nom sans écho que Rodrigo de Zayas a écrits directement en français ? Grande fresque romanesque ou essai politico-historique ? La fiction, choisie comme mode d’expression par l’auteur, nous engagerait à considérer La Brigue et la talion, Les Faussaires et Shéol comme des romans. Mais le peu de soin apporté à l’art romanesque de ces trois premiers opus indiquerait que l’auteur se comporte vis-à-vis du genre comme le faisait Rabelais quant au registre de la chevalerie : en gros, « bâclons vite fait ce que l’époque attend de nous et gardons notre énergie à faire ce qui nous importe réellement. »
Né à Madrid en 1935, Rodrigo de Zayas est un intellectuel éclectique : fils du fondateur de la Modern Gallery new-yorkaise, concertiste réputé, homme politique engagé à gauche, historien, bibliophile, ce polyglotte joue avec virtuosité de son érudition… au détriment, donc, de toute épaisseur romanesque. Un exemple : dans le deuxième tome, Les Faussaires, l’héroïne juive, Judith vient d’être violée par un Polonais grossier : « elle se releva, le visage, le dos, les poumons et le ventre en feu ». C’est tout. Le viol ne provoquerait que cela ? Des inflammations ?
On pourrait également évoquer les dialogues, tellement artificiels qu’ils semblent récités par des personnages bons élèves. Cela devrait suffire à faire tomber des mains, un à un, chacun de ces volumes. Et pourtant. À la lecture des trois premiers livres de ce qui finira par constituer 1 500 pages, on n’attend qu’une chose : la suite ! À cela au moins trois raisons. D’abord, le projet du romancier ne manque pas d’ampleur : montrer les liens entre l’Inquisition et la Shoah. Ensuite parce que ce travail romanesque est purement engagé : s’appuyant sur une connaissance époustouflante de l’histoire et des religions, le romancier fustige tout ostracisme. Enfin parce que l’auteur gagne le pari de l’intelligence. La chair qu’on aurait voulu trouver dans les personnages s’est constituée en fait dans la pensée qui justifie ce travail romanesque. Il est des éruditions qui fonctionnent comme des mécaniques précieuses d’horlogerie. Les voir en mouvement est simplement beau. La mécanique ici impose ses dimensions gargantuesques : si l’on traverse des siècles et des continents, on explore également des milieux très différents les uns des autres. Le brassage nous projette dans un ghetto juif de Pologne, sous les lambris des plus grands hôtels, dans la froidure du Vercors, sur les dalles de marbre des banques suisses, au cœur des toiles des grands maîtres espagnols. À cela, s’ajoute chez de Zayas, une machiavélique dextérité à introduire la tension dans ses récits : les duels se font à coups de phrases et l’auteur sait faire entendre ce que torture psychologique veut dire. Le roman joue le rôle d’un échiquier monumental où Judith, la belle héroïne, s’avance et combat pour offrir au peuple juif un nouveau territoire en Palestine. Et si, dans la construction complexe du troisième opus, le lecteur est plongé dans un labyrinthe cauchemardesque c’est qu’en France sous l’Occupation, les blancs souvent s’habillaient de noir et les noirs de blanc. Difficile alors d’avancer sur l’échiquier la bonne pièce.

Ce Nom sans écho
Rodrigo de Zayas

L’Esprit des Péninsules
(21, rue du Grand Prieuré 75011 Paris)
T1. La Brigue et le talion
340 pages, 139 FF
T2. Les Faussaires
310 pages, 135 FF
T3. Shéol
230 pages, 129 FF

L’échiquier de l’Histoire Par Thierry Guichard
Le Matricule des Anges n°19 , mars 1997.
LMDA PDF n°19
4,00