Après Bien malin qui connaît son père et Love, parus simultanément l’année dernière, les éditions Bourgois poursuivent la publication des ouvrages de l’écrivain anglaise Angela Carter avec deux nouveaux romans, Le Théâtre des perceptions et La Danse des ombres. Morte en 1992 à l’âge de 51 ans, Angela Carter met en scène des personnages perclus dans une sorte d’impassibilité souffrante, d’attention désabusée face leur existence manquée. Ils semblent avoir accompli une moitié de chemin avant de s’être résignés à une passivité destructrice. Ils sont entourés de gens dont ils connaissent trop les faiblesses pour les aimer. Ils fréquentent des maisons mal tenues, de bars mal éclairés, habitent surtout des histoires travaillées par un désamour, une hérédité incertaine ou tragique ; leur mal-être affleure parfois dans des dialogues oniriques qui ne font que contribuer à les éloigner d’eux-mêmes. Très supérieur aux autres œuvres traduites à ce jour, Bien malin qui connaît son père inclut pas mal des réponses aux questions que posent en vain la plupart des héros perdus d’Angela Carter. On y trouve un humour, une ingéniosité narrative, un pétillement qui fait parfois défaut aux autres récits. La remarquable leçon de vie qui émane de Bien malin… mais également l’homogénéité des thèmes, certaines fulgurances présentes dans les quatre ouvrages, justifient que nous revenions à l’occasion des futures parutions sur cet écrivain, dont l’éditeur nous dit qu’elle est aujourd’hui plus populaire en Grande-Bretagne que Virginia Woolf.
Angela Carter
La Danse des ombres
Traduit de l’anglais
par Jean Guiloineau
234 pages, 110 FF
Le Théâtre des perceptions
Traduit de l’anglais
par Michel Doury
Christian Bourgois
192 pages, 95 FF
Domaine étranger Le théâtre des ombres
juin 1998 | Le Matricule des Anges n°23
| par
Christophe Fourvel
Des livres
Le théâtre des ombres
Par
Christophe Fourvel
Le Matricule des Anges n°23
, juin 1998.