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Poches Miroir, joli miroir

janvier 1999 | Le Matricule des Anges n°25 | par Thierry Guichard

Capable de parler brillamment de tout, Philippe Sollers montre qu’il sait aussi ne rien dire en se montrant bavard. Reste l’excitation du savoir.

L’histoire s’écrit toujours par les vainqueurs. Fort de ce principe et peu enclin à attendre le jugement du temps, Philippe Sollers sait s’entourer d’hagiographes. Soucieux, semble-t-il, d’imposer la pérennité de ses écrits et de sa figure, le bonhomme qui jouit de responsabilités chez Gallimard ne rechigne pas à ce que paraissent régulièrement des ouvrages à sa gloire. Comment, en effet, ne pas voir dans ce Vision à New York un socle supplémentaire apporté à la statue du commandeur (génie du titre : remplacez New York par Romorantin, par exemple, et bien ça ne fonctionne pas) ? Et Philippe Forest, auquel on doit une histoire de Tel Quel très sollersienne (au Seuil, dans la collection de Denis Roche) et un beau roman publié à l’Infini (collection dirigée par Sollers) a beau nous prévenir dans sa préface de l’importance quasi planétaire de ce petit bouquin : on reste bien en peine d’en retirer une quelconque substantifique moëlle. Bien sûr, la culture de Philippe Sollers pétille dans ces pages d’entretien accordé à l’Américain David Hayman. Mais la retranscription de ces journées d’entretien aurait pu sélectionner un peu plus les échanges, quitte à perdre de sa spontanéité. Car les propos de café du commerce ne sont agréables qu’à ceux qui y participent, un coude appuyé au zinc, et perdent pas mal de leur saveur, rapportés vingt ans après qu’ils furent émis. Un exemple ? Lancé sur l’évocation de danses macabres et carnavalesques mexicaines par David Hayman (qui connaît son Bakhtine), notre auteur national résume en une formule le fond de sa pensée : « Selon qu’on aura tel ou tel tempérament, telle ou telle profondeur de vue, telle ou telle ambition, on mettra plus ou moins l’accent sur tel ou tel aspect. » Et réciproquement a-t-on envie d’ajouter. Avec de telles prises de position, on comprend que cet intellectuel ait appelé à voter Balladur. Autre perle, deux pages plus loin, à propos d’une citation d’Artaud : « Je crois que ça se passe de commentaires -encore que ça pourrait donner lieu à un commentaire bien précis. » Qu’on n’aura pas, mais bon, nous sommes entre gens de connivence, les choses n’ont pas à être dites ; il suffit de les évoquer.
Mû par une mythologie romantique surranée, Sollers se tend un miroir qui lui renvoie tour à tour l’image d’un enfant surdoué (à cinq ans, il s’inquiète du manque d’unité de l’Etat français), d’un écrivain planétaire au goût sûr (hors Venise, New York et Bordeaux, point de salut), d’un descendant des esprits persécutés (né plus tôt, il se serait appelé Giordano Bruno).
Si, selon Philippe Forest, cet entretien réalisé au moment où Sollers finit Paradis annonce ce que sera Femmes, « ce formidable « coup double » dont on mesurera de plus en plus clairement à quel point il est sans équivalent dans la littérature française actuelle » il cherche surtout à répondre aux détracteurs qui virent en Femmes une trahison de l’avant-garde. En effet, pape de cette avant-garde qui fit les beaux jours de Tel Quel (dont Sollers s’attribue seul la paternité : merci pour Edern Hallier, Huguenin et les autres), Sollers semble avoir jeté aux orties le dogme esthétique et idéologique pour s’investir dans le roman linéaire à connotation autobiographique. Retournement de veste auquel aujourd’hui l’époque nous a habitué mais dont ce livre tente de démontrer qu’il n’en est pas un. Ne seront convaincus que ceux qui le sont déjà. Toutefois, à force d’évoquer superficiellement de grands sujets de réflexion, ce bougre de Sollers nous met en appétit de lectures et de savoir. Finalement, dans ce café du commerce, il se pourrait bien que ce soit lui le barman.

Vision à New York
Philippe Sollers

Folio
227 pages, 35 FF

Miroir, joli miroir Par Thierry Guichard
Le Matricule des Anges n°25 , janvier 1999.
LMDA PDF n°25
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