Les collections suscitent des passions souvent irrationnelles.
On en oublie presque qu’elles structurent aussi des personnalités et se transmettent à l’intérieur des familles de génération en génération. Ce sont ces processus de transmission que les huit nouvelles de John Murray, médecin américain d’origine australienne, ayant travaillé dans l’humanitaire, mettent en lumière. Comment devient-on ce que l’on est ? La plupart des protagonistes de ces textes ont émigré, quittant souvent l’Inde pour les États-Unis, parfois y retournant. S’ils se sont élevés dans la hiérarchie sociale, devenant d’éminents spécialistes, ils naviguent eux et leurs descendants dans un entre-deux culturel souvent douloureux. Ainsi l’héroïne de la première nouvelle, Elisabeth Dinakar, spécialiste du choléra vient en Inde et y trouve un cloaque sanitaire. Carriériste, travailleuse acharnée, elle avait réussi à s’oublier. L’Inde lui redonne des racines et de la force de vie. Dans le titre éponyme, un chirurgien vieillissant, alcoolique, se réfugie dans la collection de papillons de son grand-père pour essayer de se comprendre. Par une écriture très maîtrisée, John Murray dénoue des nœuds de vie. C’est brillant d’humanité. « Nabokov serait tombé d’accord avec mon grand-père : il ne croyait pas que la survie dans la nature exigeait cette beauté et cette perfection. »
Quelques notes sur les papillons tropicaux
de John Murray
Traduit de l’américain par Cécile Deniard
Albin Michel, 340 pages, 20 €
Domaine étranger Battements d’ailes
octobre 2005 | Le Matricule des Anges n°67
| par
Dominique Aussenac
Un livre
Battements d’ailes
Par
Dominique Aussenac
Le Matricule des Anges n°67
, octobre 2005.