L’eau, le feu et l’air, trois ouvrages, trois thématiques. N’allez toutefois pas croire que Pascal Morin fait dans le tellurique, passionné qu’il serait par les énergies de la terre. Non, c’est plutôt l’intime son terrain de prédilection. Dans l’Eau du bain (Le Rouergue, 2004), une piscine lui permettait d’éliminer tous les aïeux mâles d’une même famille. Dans Les Amants américains (idem, 2005), le feu provoqué par une jeune fille solitaire brûlait une grange et un chien. Bon vent réunit cinq hommes en pleine montagne dans une ancienne caserne. Cinq hommes qui souhaitent voler, stagiaires du club des Aigles qui initie au vol libre. Cinq hommes qui essayent de s’oublier en s’envoyant en l’air. Paul, le narrateur, dit être journaliste mais essaye seulement d’effacer un chagrin d’amour. Un jeune homme s’est écrasé sur la Montagne-Rouge. Accident ou suicide ? La mort plane. Un père vient faire partager sa passion pour le parapente à son fils adolescent. Ce dernier a peur. Deux femmes en retrait attendent de récupérer le corps de leur fils et frère. Un vieil aubergiste homo, boiteux par amour, accident de parachute, se raconte. Quand il n’y a plus d’amour doit-on choisir la mort ? Être homme, est-ce apprendre à être lâche ? Les trames narratives chez Morin sont a minima, ce qui importe c’est ce qui se passe entre les êtres, le non-dit des désirs, le non-dit des peurs. Si les deux premiers ouvrages véhiculaient une tension ou un climat abrupt et délétère, où morts violentes et ambiguïtés sexuelles prévalaient, Bon vent paraît plus apaisé, peut-être parce que la souffrance du narrateur y est plus explicite. Peut-être parce que le narrateur parvient à se dépasser, et s’ouvrir à une autre vie. L’écriture de Morin a des côtés très incisifs, très directs mais aussi très féminins. Il fait parler les corps, restitue les états d’âme, les émois. Ce qui est déjà beaucoup.
Bon vent de Pascal Morin, Le Rouergue, 156 p., 14 €
Domaine français Prendre l’air
octobre 2006 | Le Matricule des Anges n°77
| par
Dominique Aussenac
Un livre
Prendre l’air
Par
Dominique Aussenac
Le Matricule des Anges n°77
, octobre 2006.