Rouge-déclic N°0
Métaphore sécuritaire de ce début de siècle, le panoptique permet de tout voir sans être vu. C’est dans son ombre que ce numéro zéro de Rouge-déclic (textes, photos, chrysalides) convie en partie ses contributeurs. La folie, l’oppression, l’injustice, l’uniformisation et aussi l’humour fréquentent leurs proses. Alban Lefranc demande à une femme de ne jamais cesser de le regarder. Mais cette dernière l’a quitté il y a si longtemps qu’elle demeure à jamais inaccessible tout en haut de sa tour de verre, en son bureau directorial. Ludovic Degroote fait parler de l’au-delà sa sœur, tuée dans un accident de voiture. De là-haut voit-on tout ? L’affirmation Je serai neuf de Tanguy Viel sollicite d’autres plumes. Nina Yargekov rend un Rapport d’activité sur cette expression qui conclut que ce slogan « était passablement inefficient, pour ne pas dire dangereux, du point de vue de l’incitation au renouvellement personnel de ses concitoyens en déshérence. » Le dernier texte de Frédéric Ciriez transforme Le Train des écrivains qui convoie ces derniers à la foire de Brive, en transport du cauchemar. Deux auteurs sont remis au goût du jour : Hélène Bessette et le vivifiant Joseph Delteil. La revue (dont l’espérance de vie est fixée au 7e numéro, soit 2013) alterne gravité et dérision, privilégie des formes novatrices d’écriture. Les photos en quadrichromie affichent une tentation pop. Tonifiant, plus proche de l’atelier d’architecture que du laboratoire clinique.
Rouge-déclic N°0 80 pages, 6,50 € (22, boulevard Saint Denis 75010 Paris)