C’est un trait caractéristique de ma propre psychologie de ne jamais avoir été capable de tolérer l’incertitude », déclare d’emblée Leonard Balmain. La vie de cet écrivain prend pourtant une tournure étrange, à la suite d’une simple petite annonce parue dans le journal. Un certain Torquil Tod cherche quelqu’un pour écrire son autobiographie, mission qu’il accepte de manière impulsive – à son plus grand regret. En effet l’homme lui raconte, selon de longues séances assez plates, l’itinéraire de sa vie entre la Nouvelle-Zélande, l’Écosse et le Canada. Rapidement, le ton trop détaché de Tod inquiète son auditeur, qui sent qu’il lui cache quelque chose. « Il refusait de me laisser voir les contours émotionnels des événements auxquels il voulait que je redonne vie », réalise-t-il.
C’est alors que le diable apparaît, sous des traits féminins : Abigail Gray. Cette dernière, adorée aussitôt rencontrée, le conduira jusque dans les recoins les plus isolés d’Écosse, au sein de communautés œcuméniques et sectaires. Dès lors, « il était obsédé, ensorcelé et physiquement dépendant ». Le récit emprunte soudainement une voie différente de celle que l’on aurait crue : le roman à suspense se mue en aventure surnaturelle. Nous voilà propulsés en plein cœur de la magie blanche, avec ses philtres d’amour et autres rituels initiatiques. John Herdman, dont le travail s’inspire beaucoup de Robert Louis Stevenson et de la thématique de la dualité, nous dépeint un personnage envoûté par « la puissance de l’irrationnel », prêt à tout pour plaire à celle qu’il aime. Les événements se précipitent jusqu’à un point de non-retour : l’autobiographie s’achève dans l’horreur, mettant la vie de Leonard Balmain, seul dépositaire de cette dangereuse confession, en danger. Le poids du passé est impossible, pour l’un comme pour l’autre, à porter. Jusqu’à la fin, l’auteur nous tient en haleine, nous emprisonnant nous aussi dans ce « paysage psychique terrifiant et ambigu ».
Camille Cloarec
La Confession de John Herdman
Traduit de l’anglais (Écosse) par Maïca Sanconie
Quidam, 183 pages, 20 €
Domaine étranger La Confession
avril 2018 | Le Matricule des Anges n°192
| par
Camille Cloarec
Un livre
Par
Camille Cloarec
Le Matricule des Anges n°192
, avril 2018.