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Poches Le rire dissout le nazi

juillet 2023 | Le Matricule des Anges n°245 | par Éric Dussert

Collectant les brimborions imprimés ou dactylographiés de la Résistance, l’historienne Alya Aglan met en évidence l’humour de Français vaincus mais résolus au cœur d’un temps troublé.

Le Rire ou la vie. Anthologie de l’humour résistant 1940-1945

L’étude des éphemera est une activité de plus en plus prisée des chercheurs depuis que diverses numérisations et mises en ligne ont mis en évidence leur teneur en informations précieuses. Il fallait jusqu’à présent fouiller dans les recoins les plus sombres des archives, musées et bibliothèques pour repérer ces « pièces » négligées, souvent accumulées en « recueils » (boîtes) non cataloguées. C’était au petit bonheur la chance… La présente Anthologie de l’humour résistant démontre admirablement ce qui peut être tressé à partir de ces brimborions de l’Histoire, à peine considérés par le passé, réduits qu’ils ont toujours été à un usage proche de celui de la presse : c’est-à-dire qu’ils étaient jetables encombrant les fonds de tiroirs des grands-parents avant de disparaître à la benne lors des grands ménages d’après-succession. Elya Aglan, sa compilatrice, a un brillant prédécesseur avec l’historien de l’image John Grand-Carteret (1850-1927), qui commença à collecter, outre des estampes, les témoignages imprimés volatils mais très significatifs de la vie collective (L’Histoire, la vie, les mœurs et la curiosité par l’image, le pamphlet et le document, 1450-1900, Librairie de la curiosité et des beaux-arts, 1928, 4 vol.).
Optant pour une période beaucoup plus récente de notre histoire, Alya Aglan s’est intéressée à la documentation relative à une activité mal connue de la Résistance durant la Seconde Guerre mondiale : l’humour et la contre-propagande. Probablement représentative du mauvais esprit d’un peuple resté toujours, au fond, un peu gaulois, elle a compilé ces tracts, papillons, libelles, brochures et paperolles de toutes sortes qui étaient initialement imprimés avec une durée d’usage très bref (on fusillait pour moins que ça), parachutés par les Alliés ou distribués sur le modèle du samizdat de la main à la main dans des conditions de dangerosité extrêmes. Ces dactylogrammes et impressions hâtives réservent quelques morceaux de bravoure et de drôlerie, quand bien même l’époque était au tragique. Ridiculiser l’adversaire comme le feraient des chansonniers était une arme psychologique au moins aussi puissante que les messages de soutien des émissions radio de Londres. Et on faisait alors feu de tout bois, depuis la caricature jusqu’aux graffitis en passant par le détournement de chanson, le calembour ou le pastiche.
Dès juillet 1940, jaillissent au cœur de ce « règne du bizarre » les « Trente-trois conseils à l’occupé » du militant socialiste polygraphe Jean Texcier (1888-1957), alors rédacteur du ministère du Commerce, journaliste, dessinateur et critique littéraire : sous la forme d’un dactylogramme recopié à la main par ses lecteurs, puis imprimé clandestinement en août 1940, Texcier prodiguait d’excellents conseils à ceux qui ne souhaitaient pas collaborer, malgré les injonctions d’une classe politique incapable d’assumer les événements : « ne te fais pas d’illusion, CE NE SONT PAS DES TOURISTES » Ou bien encore : « Tu ne sais pas leur langue, ou tu l’as oubliée ». Quoi qu’il en soit « ne va pas, pour te faire bien voir, au-devant de leurs désirs ». Et Texcier de forcer le rire, malgré l’amertume de la défaite : « C’est entendu. Ils savent chanter en chœur et d’une voix juste. Mais c’est au commandement, comme pour un exercice respiratoire. Chez nous, le soldat chante faux et rarement en mesure ; mais il ignore la corvée du chant. Il chante quand ça lui chante » Tous les écrits réunis ici naviguant entre le sarcasme, l’ironie et l’information (ils plaçaient nommément les collaborateurs dans le paysage en précisant la vérité de leurs actions, et on pense par exemple à l’amiral Darlan qui jouait un jeu trouble), la vérité des camps ou des exécutions n’était pas omise, comme dans ce dactylogramme qui peint la crèche de 1940 et 1941 : « Cette année pas de Noël/ La Sainte-Vierge et le Petit Jésus sont prisonniers. St-Joseph est en camp de concentration, les anges descendus par la D.C.A, l’étable réquisitionnée, l’étoile peinte en bleu par le Chef d’Ilot, les Rois Mages sont en Angleterre./ LA VACHE EST A BERLIN/ L’ANE EST A ROME. »

Éric Dussert

Le Rire ou la vie.
Anthologie de l’humour résistant, 1940-1945,

d’Alya Aglan
Folio histoire, 304 pages, 9,20

Le rire dissout le nazi Par Éric Dussert
Le Matricule des Anges n°245 , juillet 2023.
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