auteur Aslı Erdoğan
A propos
D'une douleur ancienne
Emprisonnée en août dernier par le régime d’Ankara, la romancière turque a été mise en liberté conditionnelle fin décembre. Devenue un symbole, elle est avant tout l’auteure d’une œuvre singulière et profonde. Comme la nuit.
On l’avait rencontrée, en 2009, au festival Meeting à Saint-Nazaire. Avec sa casquette vissée sur la tête, Aslı Erdoğan semblait une sorte de Gavroche féminin. Elle portait, dans la base sous-marine de la cité ligérienne où se déroulaient les rencontres littéraires, une silhouette d’enfant au front barré des traces d’une « douleur ancienne ». Cette année-là paraissait en Turquie son roman Le Bâtiment de pierre : entre poésie et récit, un livre sombre traversé d’images entêtantes où se réécrivaient les cercles de l’Enfer de Dante. La même année, Actes Sud publiait son livre le plus...
Journal d’un combat
Décidés à venir défendre la liberté d’expression et arracher Aslı Erdoğan à la prison, une poignée de Français à l’initiative notamment des écrivains Tieri Briet et Ricardo Montserrat ont fait le déplacement à Istanbul. Pour rendre compte, aussi.
Les choses sont allées vite. Après les appels à protester contre l’arrestation et la détention d’Aslı Erdoğan en août dernier, il est apparu pour certains qu’il fallait répondre à la répression d’Ankara par la littérature elle-même. Ils ont été quelques-uns à s’engager dans un combat qu’on aurait pensé d’une autre époque : ouvrir les portes d’une prison par le seul fait de lire ici, là et...
Ouvrage chroniqué
Le Mandarin miraculeux
de
Aslı Erdoğan
2006
La narratrice, une jeune femme turque, erre dans Genève une fois la nuit tombée. Depuis le départ de Sergio, son amant, elle a perdu l’œil gauche. Désormais objet de peur et de répulsion, elle se réfugie dans la solitude et une ironie teintée de cynisme ; la voilà racontant l’intérêt que lui manifeste un jeune Français croisé dans un café : « Il devait se figurer que j’étais une femme écrivain du Tiers Monde qui avait perdu un œil en combattant pour la démocratie. » En réalité toute sa personnalité est habitée par la douleur, et semble prête à se briser à la moindre manifestation de...