Autant prévenir le lecteur tout de suite lorsqu’il abordera les pages de Cantons, le nouveau recueil de poèmes en prose de Pierre Descamps : il est en présence d’un très beau livre. Tout simplement parce que ces poèmes nous parlent de la vie, des hommes et des paysages qui la composent. Ici la réflexion s’accompagne d’un style impeccable, l’auteur s’efforçant de réconcilier un passé, un mode de vie simple proche de la nature (sur les traces d’un Pasolini) loin de la tourmente de notre monde moderne, où toujours trop pressé on en finit par oublier l’essentiel. Pierre Descamps nous conte des régions, des paysages oubliés et il nous le dit clairement : « Rien ne sera plus comme avant ». Les regrets marquent l’ensemble de cette œuvre. On sent le souffle de la beauté gagner les saisons : « Là, dominent la rêverie crépusculaire, la douce mélancolie des heures nocturnes encore pénétrées de vague lumière. Des mains tâtonnent. Le foyer s’attise. » On saluera également l’originalité de la présentation, un bandeau de James Guittet accompagne chaque page de l’ouvrage. Celles-ci se découpent en deux poèmes et en deux couleurs, la première prose marquée en italique parle des paysages, des animaux et des activités humaines, alors que la deuxième prose en parallèle nous raconte l’histoire d’un homme et d’une femme chargée d’érotisme : « La bouche bée, elle se tient penchée, les jambes ouvertes. Elle n’esquisse pas un geste pour soustraire son corps potelé à l’homme qu’elle regarde d’un air consentant, presque avec miséricorde. »
Cantons marque pour la quatrième fois la collaboration de Pierre Descamps avec les éditions Jacques Brémond, et l’auteur nous livre du même coup une œuvre aboutie. La parole du poète nous touche et nous laisse dans cette interrogation de notre écho intérieur : « Le paysage idéal savamment composé est dû à l’imagination. Jamais le sentiment de la nature ne s’est fait plus doux ».
Cantons
Pierre Descamps
Editions Jacques Brémond
58 pages, 100 FF
Poésie Paradis perdu
janvier 1999 | Le Matricule des Anges n°25
| par
Stéphane Branger
Un livre
Paradis perdu
Par
Stéphane Branger
Le Matricule des Anges n°25
, janvier 1999.