Maurice Nadeau a trente-six ans lorsqu’il publie à La Jeune Parque la première anthologie vendue en librairie des écrits de Sade. Pas pour longtemps : une mesure de police va éteindre sa diffusion. 1947, la date n’est pas si lointaine et l’on peine à se figurer ce que représentait alors cette oeuvre-là, comme nous paraît étrange cette police qui se mêlait de littérature. Nos limiers ont mieux à faire aujourd’hui, à moins qu’ils n’aient pris goût aux publications de Maurice Heine, de Gilbert Lely ou de Jean-Louis Debauve qui consolidèrent jusqu’à récemment le corpus des oeuvres sadiennes tandis que Georges Bataille, Pierre Klossowki, Maurice Blanchot et Annie Le Brun en tissaient l’exégèse. Journaliste à Combat après avoir servi le Journal du PSOP, Nadeau est un normalien qui a quitté son poste pour se consacrer à la critique littéraire. Son premier livre est une Histoire du surréalisme (1945), au contact duquel il a pris connaissance du divin marquis. « La lecture de Sade vous empaume » constate-t-il en préface à son « Exploration de Sade ». C’est dire que les écrits subversifs de Sade n’ont pas fini de nous secouer puisqu’il recommande aux révolutionnaires de son temps de ne « pas abandonner l’état d’insurrection où ils se sont placés. Une liberté sexuelle sans limites, établissant pratiquement la communauté des corps, la licence dans le meurtre, la permission du vol, de la calomnie, la faculté de tourner en ridicule toutes les religions et d’en interdire l’exercice, constituent ses revendications essentielles. » Accompagné du fameux « Français, encore un effort si vous voulez être républicains » qui ne saurait tomber mieux, l’essai de Maurice Nadeau mérite d’être lu parce qu’on y retrouve la pens&
Sade, l’insurrection permanente
Maurice Nadeau
Maurice Nadeau éditeur
156 pages, 15 euros
Histoire littéraire Sade pour tous
juin 2002 | Le Matricule des Anges n°39
| par
Éric Dussert
Un livre
Sade pour tous
Par
Éric Dussert
Le Matricule des Anges n°39
, juin 2002.