C’est un singulier trafic d’âmes et de mots, d’aveux et de désirs que nous invite à partager Claude Louis-Combet au fil des dix textes qu’il a réunis dans Toutes les bêtes sont mortelles. À l’exception du premier, Le bœuf et la grenouille – qui poursuit la fable de La Fontaine en racontant ce qui advint après que la grenouille a éclaté – tous les autres textes se nouent, sur fond de jeu d’attraction fascinée et de répulsion inquiète, autour de la hantise d’une confusion entre l’homme et la bête ou de l’affleurement de la bête en l’homme. Qu’il s’agisse d’un chat ou d’un singe, d’un porc ou d’un serpent, c’est ce que l’individu projette dans ces animaux, et la façon dont il s’y projette, que scrute, sonde, accompagne Claude Louis-Combet. Dans Les larmes d’une truie ou dans Ce que Bloody Mary eût aimé dire à son poète – « Je n’étais qu’une guenon et vous me traitiez comme une femme » –, c’est le désir humain de coïncidence avec la primitivité du sexe qu’il met en lumière. Ou bien c’est le rapport à soi-même, à travers l’image que l’animal nous renvoie de nous-mêmes, qu’il met à nu. Par contre, ce sont des souvenirs personnels d’adolescence empêtrée de religion et de sensualité, qui forment la trame de Belzébuth et son frère, La mort de César, Ce qui advint à Cobra pacifique. Des expériences chargées de secrets et inscrites à jamais en lui comme autant de signes de son destin. Une manière d’éclairage indirect d’une âme à la recherche d’elle-même parmi la honte et la douleur, la jouissance interdite et l’enlisement anxieux dans la culpabilité et l’indignité.
Une suite de textes où l’animal apparaît comme « un acteur de l’âme » au même titre que les figures mythobiographiques qui donnent à l’œuvre de Claude Louis-Combet toute sa puissance d’émotion.
Richard Blin
Toutes les bêtes sont mortelles
Claude-Louis Combet
Corti, 176 pages, 17 €
Domaine français Toutes les bêtes sont mortelles
avril 2021 | Le Matricule des Anges n°222
| par
Richard Blin
Un livre
Par
Richard Blin
Le Matricule des Anges n°222
, avril 2021.