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Poésie Le faste des décombres

novembre 1997 | Le Matricule des Anges n°21 | par Éric Dussert

La Prise d’Aubervilliers

Avec La Prose d’Aubervilliers, Jacques Sommer établit le projet d’épuiser un lieu pas tout à fait parisien. Son poème magistral prend la poésie contemporaine à contre-pied.
Depuis la publication en 1973 et 1974 des poèmes de Nervures du givre (Guy Chambelland) et du très beau roman poétique Les Seuils (Albin Michel), Jacques Sommer a regagné l’incognito qui sied aux discrets et aux grands travailleurs. En douce, il a tout de même pris place aux sommaires de La Sape ou de la Nouvelle Revue française. Et tout récemment, une plaquette collective vendue sous le manteau - les Turgescences (1997) ne se portent pas à la boutonnière - le dénonçait comme membre d’une académie grivoise où ripaillent Claude de Burine, Yves Martin et Dominique Joubert. Voilà ce qu’on ne soupçonnait pas, pas plus que l’oeuvre en cours.La Prose d’Aubervilliers est un gigantesque poème de deux cent quarante pages. Une somme de plusieurs centaines de strophes courtes qui démontre que l’on n’a pas affaire à un rétif mais à un prolixe précautionneux. Jacques Sommer s’est saisi d’une mission qui vaut bien celle d’Homère, rédiger dans « un long déroulement fluide » la chronique tout en image des friches industrielles d’Aubervilliers. Moins lointain que celui d’Ulysse, le périple réclame un capitaine opiniâtre.Chef-lieu du canton de Seine-Saint-Denis, Aubervilliers l’industrieuse avait eu les honneurs d’un roman du prolétarien Léon Bonneff en 1949. Du décor seuls subsistent les débris de fabriques, un no man’s land propice à la légende qui attendait un poète pour en graver les chants. Jacques Sommer est celui-ci, infiniment précis, méticuleux au point de revenir sur ses pas là où gît « La longue rouille pourtant/ Des grilles closes » dans le souci de « Ne pas craindre de dire/ Le décalque du sable/ L’écho de l’écluse ».La force de ce livre magistral tient à la conjonction d’un format inusité et d’une langue granitique qui frotte la matière jusqu’à complète usure. « Tôles rouillées/ Briques/ Rouges sali rainures noires ». La Prose bouleverse les canons de la poésie contemporaine. Lyrique, cursive et redondante, nourrie de blasons et de métaphores qui s’émaillent de mots rares - sans oublier « Des essieux mis à nu » -, elle prend sur son aire périphérique des allures d’épopée. C’est la Légende des siècles par André du Bouchet, l’Iliade signée Saint-John Perse. Par ce livre-poème, Jacques Sommer se lie à la fratrie des poètes de haute science. Outre la réminiscence des Seuils dont le titre souligne un cheminement spirituel, il y a dans « La quête attentive/ Nommant l’intime/ Nommant l’alliance/ Du plus simple avec le péri » la volonté de souder le récit aux matières végétales, minérales et humaines : « Le banal en sa gloire latente ». La Prose d’Aubervilliers est le sanctuaire d’un « Royaume déchu » que secouent « Les houles vierges les portes/ Intimes/ D’une joie dérobée ». Dans « La nacre des décombres », on trouve des trophées précieux, des chevelures et des épaules nues, des fleurs tenaces qui côtoient les poussières miraculeusement belles. « Tu passes là où rien ne passe/ Rien qu’une vigueur des mondes morts ». En gravissant les degrés d’une échelle de sapience, Jacques Sommer sort de sa retraite et va « Vers le bleu rejoindre/ Par la montante courbe/ […] Les sphinx/ De l’oubli vivace » qui sont les muses de sa poésie.

La Prise d’AubervilliersJacques Sommer
Dumerchez239 pages, 120 FF.

Le faste des décombres Par Éric Dussert
Le Matricule des Anges n°21 , novembre 1997.
LMDA PDF n°21
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