Connu et reconnu pour l’extrême condensation elliptique de ses images, Miguel Suárez est l’un des principaux poètes espagnols contemporains. Il publie depuis 1986. Ce que rythment les textes de La Voix de l’attention, c’est une manière d’être là, de s’ouvrir à un lieu, à une saison, à un moment, à l’autre. Textes courts à peine quelques paragraphes pour refléter, de la réalité, l’étoilement, les tensions ou les forces qui s’y conjuguent. Une prose d’éveil qui traduit une sorte de relation purifiée au réel, concentre des présences, articule l’événement au sens de ce qu’il y a plus que de ce qui surgit à la respiration du monde et au sentiment d’être. « Fermes chaulées. C’est important pour le dégel se dit-il le son d’un marteau sous les hautes cimes, dans le soir ébahi. Et le chant d’un oiseau. Qu’on pourrait étouffer d’une seule main ».
Une parole qui garde quelque chose de la nudité de l’inaugural et du mouvement de l’avancée de la marche, tout en maintenant vivant le point de vibration extrême d’un certain nombre de coexistences ou de coïncidences. « La vie. La vie comme une présence. Où s’unissent les vies. Mousse autour de l’écorce, rameau dans le givre./ Ainsi sera toute réunion. La voix cassée, tu souriras. Sans encoches ton bâton. Corbeaux et cygnes, et mélodies, plus loin, et dans le frisson d’aujourd’hui./ Fais valser, le chœur c’est la lumière. Crible le fémur de la langueur, la bouche muette et son sanglot. Entretiens le feu. »
Une écriture paradoxale comme l’existence, fragmentaire aussi comme peut l’être notre perception de l’espace.
La Voix de l’attention de Miguel Suárez
Traduit de l’espagnol par M. Joulia & Jean-Yves Bériou, Antoine Soriano Éditeur (127, rue de la Glacière 75013 Paris), 128 pages, 20 €
Poésie Éclats de brûlure
avril 2004 | Le Matricule des Anges n°52
| par
Richard Blin
Un livre
Éclats de brûlure
Par
Richard Blin
Le Matricule des Anges n°52
, avril 2004.