Le Chant du monstre N°1
Chaque nouvelle revue veut inventer un espace neuf, un lieu de littérature et d’écritures inédites comme il n’en existe pas. Cette profession de foi est la règle, malgré l’abondance du genre en librairie comme le constate le premier numéro Le Chant du monstre dans son édito en voulant se situer dans les « lisières », les « entre-deux », les « hybridations », entre texte et création graphique… Et de citer une très belle phrase de Fernando Pessoa : « la littérature, comme toute forme d’art, est l’aveu que la vie ne suffit pas ».
Faisons donc deux listes. Les nouveautés ou raretés de cette revue : un format tout en hauteur, le choix argumenté par un éditeur de longs extraits des livres qu’il a publiés (ici avec les éditions Monsieur Toussaint Louverture), une tentative poussée et quelque peu obscure de poésie hybridant textes et graphiques (Donatien Garnier et Guillaume Bullat) et un cabinet de curiosités consistant en l’exploration de ses dessins par leur auteur (l’étrange et étonnant travail de Frédéric Noël).
Seconde liste, ceci n’étant pas forcément une critique, les rubriques qui reprennent des idées et formes existant par ailleurs : un auteur invité pour donner « un coup de pied dans la fourmilière » littéraire (ici Fabrice Colin, auteur jeunesse, qui épingle David Foenkinos et Guillaume Musso tout en s’avouant désarmé face à la simple ambition de « raconter » de ce dernier), la remise au goût du jour d’un « oublié » (l’écrivaine punk Kathy Acker), des croisements entre prose, poésie et dessin (plutôt illustratifs entre Thomas Vinau et Emilie Alenda ; plus troublants avec un extrait de Géométrie dans la poussière de Pierre Senges et Killoffer publié chez Verticales) et enfin la publication d‘un texte inédit (Pierre Terzian).
Si toutes les forces n’ont pas été jetées dans ce premier numéro – on ne leur souhaite pas – Le Chant du monstre pourra creuser sa vision de la littérature très contemporaine et accentuer ce qui fait son originalité. Son désir est visiblement aussi grand que la gueule ouverte de sa couverture.
Christophe Dabitch
Le Chant du monstre N°1
Éditions Intervalles, 123 pages, 15 €