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Domaine étranger Mission impossible

janvier 2013 | Le Matricule des Anges n°139 | par Jean Laurenti

Ce récit anonyme de la sanglante expulsion des Français du royaume de Sicile met en scène le talent de stratège de Jean de Procida.

Les Vêpres siciliennes

Soit un monde où les monarques seraient jetés au bas de leur trône par des armées coalisées au nom d’intérêts fluctuants. Où de cruels tyrans, haïs pour leurs méfaits mais courtisés pour leurs richesses et leur influence, verraient tel jour un tapis rouge se dérouler sous leurs souliers ou leurs babouches et tel autre une pluie mortelle s’abattre sur leur tête soudain mise à prix. Ce monde, dont de mauvais esprits diront que le nôtre lui ressemble parfois, était celui d’un temps fort lointain, où quelques familles aux destins liés par d’habiles stratégies matrimoniales se partageaient l’Europe et ses marches orientales. Une époque où Dante composait sa Divine Comédie, où les papes (dé)faisaient les princes (et réciproquement), où Louis IX, futur Saint Louis s’engageait dans la huitième croisade pour n’en pas revenir, où son frère, Charles d’Anjou, régnait sur le sud de l’Italie, où les partis guelfe et gibelin se disputaient la suprématie dans les royaumes d’Italie, en un Moyen Âge qui n’en finissait pas de s’achever.
C’est un morceau de cette histoire que nous conte le texte anonyme publié par les éditions Anacharsis. Dans Les Vêpres siciliennes il est question d’un complot ourdi par un noble, Jean de Procida pour faire chuter Charles d’Anjou, le puissant roi de Sicile et le chasser de l’île. Rédigé au XIIIe siècle, peu de temps après les événements qu’il relate, ce court récit (originellement intitulé en sicilien Rebellamentu di Sichilia) narre les tractations menées pendant trois ans par le très habile Procida afin de rallier à sa cause deux papes successifs et quelques princes et barons remontés contre le tyran français. Souvent vêtu d’une robe de franciscain pour voyager incognito, il sillonnera ainsi la Méditerranée sur des nefs affrétées pour lui, rencontrant secrètement ses prestigieux interlocuteurs à Trapani, Constantinople, Barcelone ou Malte, prodiguant les conseils, les menaces et l’or nécessaires à la réussite d’une telle opération.
L’affaire n’ira pas sans occasionner un massacre : quelques milliers de Français, soldats et dignitaires installés à Palerme par Charles d’Anjou, seront en effet passés au fil de l’épée, le mardi de Pâques 1282. Le prétexte de ces hostilités sera trouvé au cours de la fête donnée ce jour-là devant l’église Santo Spirito. Le Rebellamentu en relate la cruauté dans une langue admirable : « C’est là que, selon la triste habitude des Français, l’un d’entre eux saisit une femme et de ses mains la toucha malhonnêtement. Aussitôt la femme se mit à crier, des hommes de Palerme se précipitèrent à son secours et une échauffourée s’en suivit. (…) les hommes, dans un fracas de pierres et d’armes, criant “À mort les Français !” entrèrent en ville, toujours dans le plus grand bruit, envahirent les places et ils tuaient tous les Français qu’ils trouvaient. (…) À Palerme, trois mille Français trouvèrent la mort. » Cinq mille autres suivront sur l’ensemble du territoire sicilien. Souvent repris dans la littérature de l’époque, cet épisode sanglant fournira quelques siècles plus tard l’argument de l’opéra Les Vêpres siciliennes de Verdi.
La réaction courroucée de Charles d’Anjou fait partie du plan de Procida : le prince français fait le siège de la ville de Messine non pour la prendre mais pour la châtier en affamant sa population. C’est alors qu’approche la flotte puissamment armée de Pierre d’Aragon, à laquelle les troupes et les vaisseaux des Français seraient incapables de résister. Charles doit se replier en Calabre et renoncer au royaume de Sicile : « le roi d’Aragon vint à Messine avec messire Jean de Procida et les Messinois vinrent à sa rencontre en lui faisant grande fête dans le plus grand vacarme. (…) Et telle est la fin de notre récit », annonce le conteur. Avant de livrer dans un bref appendice la raison véritable de l’acharnement du comploteur.

Jean Laurenti

Les Vêpres siciliennes (Le complot de Jean de Procida)
Traduit du sicilien et présenté par J. Malherbe-Galy et J.-L. Nardone,
Anacharsis « Famagouste », 87 pages, 14

Mission impossible Par Jean Laurenti
Le Matricule des Anges n°139 , janvier 2013.
LMDA papier n°139
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