Avec Bondrée, l’écrivaine québécoise nous avait livré un roman où les atmosphères saisissantes emportaient le lecteur dans un été aussi lumineux que terrifiant. Tempêtes s’inscrit sans nul doute dans une forme de filiation : on y retrouve une dense forêt, mais cette fois dans un massif montagneux, Cold Mountain, décrit avec force détails et qui, à lui seul, est source d’angoisse tant il paraît impénétrable et hostile. Une première partie nous présente une femme, Marie, qui emménage dans une vieille maison dont elle hérite après le suicide de son oncle. Elle se retrouve coincée entre ses murs par une tempête de neige. Le froid, l’obscurité, l’isolement… les peurs et les phobies ressurgissent et l’entraînent vers la folie. Dans une seconde partie, sur l’autre versant de la montagne et au cœur de l’été, Ric Dubois s’installe dans un camping en quête de la sérénité nécessaire à l’achèvement d’un manuscrit, mais ce sont des pluies torrentielles qui s’abattent sur la région en même temps qu’une série de morts violentes et de disparitions…
Deux saisons, un même cadre naturel aussi beau que mystérieux, et une mécanique anxiogène provoquée par des conditions climatiques extrêmes : force est de constater que la plume d’Andrée A. Michaud est passée maître dans la description d’une nature qui habite son récit et en constitue l’âme profonde, dans sa lumière comme dans le déchaînement des éléments, et ce n’est pas tant les péripéties des personnages qui entraînent le lecteur que la façon dont la déraison s’immisce peu à peu et pousse les protagonistes au crime. Reste que si la seconde partie, plus enlevée, parvient à maintenir le trouble et la tension autour d’un homme épuisé qui lutte pour sa survie, la première souffre d’une multiplication d’hallucinations, de fantômes et de frayeurs variées qui fait verser le récit dans une horreur parfois trop pesante, là où sans doute une tension maintenue vive aurait porté cette narration. L. D.
Tempêtes, d’Andrée A. Michaud
Rivages, 334 pages, 22,50 €
Domaine français Tempêtes
janvier 2020 | Le Matricule des Anges n°209
| par
Lionel Destremau
Un livre
Par
Lionel Destremau
Le Matricule des Anges n°209
, janvier 2020.