Ils sont neuf, jeunes femmes et hommes de la banlieue parisienne. Et ils parlent d’amour. De la rencontre amoureuse. Celle de leurs parents pour commencer. Ce qu’ils en savent, ce qu’ils n’ont pas compris, les histoires d’amour et les mariages de raison ou de nécessité. Et puis ils se racontent. Et à travers leurs propos, c’est toute une histoire de l’humanité qui se déroule devant nous. Comment rencontrer l’autre, comment ne pas le décevoir, comment faire place au désir ? Tout cela au milieu des interdits sociaux, religieux, moraux. Comment la jeunesse se débat aujourd’hui avec l’homosexualité, la masturbation, les films porno qui font parfois figure de seule et unique éducation sexuelle ? On passe de la colère à la tendresse, du désespoir aux interrogations, des envies de liberté et de folie mais aussi au rêve d’une petite vie de famille bien rangée. Ces jeunes se confrontent à la réputation, aux rumeurs, aux codes de l’honneur, à la jalousie et à la trahison. Ils utilisent et subissent les réseaux sociaux. Ils éprouvent tout ce qui constitue le sublime et le sordide de la relation amoureuse : « on s’est regardés on n’a pas prononcé un seul mot on a compris qu’on venait de vivre une expérience unique qu’on ne pourrait plus jamais la revivre on avait découvert l’arbre de la connaissance et on était devenus vieux et mortel comme tous les autres. »
Avec Incandescences, Ahmed Madani poursuit un cycle bâti avec les habitants d’un quartier populaire. À partir de très nombreux entretiens, il écrit un texte, un texte d’auteur, nourri de toutes ces paroles. Une écriture vive, drôle, rapide, qui avance et raconte. Il y a là comme une urgence à dire les choses, à les sortir de la gêne, de la honte ou de la peur. Il ne s’agit pas de théâtre documentaire, mais bien d’un travail de création autour d’un thème ô combien éternel : l’amour. Et c’est toute une jeunesse que l’auteur insuffle à son texte, sans jamais tomber dans la sociologie de bazar ou la psychologie de café du commerce. Ces jeunes, on les aime après les avoir lus. On a l’impression de les connaître. Et c’est réjouissant.
PGB
Incandescences,
Ahmed Madani
Actes Sud-Papiers, 64 pages, 10 €
Théâtre Amour choral
juillet 2021 | Le Matricule des Anges n°225
| par
Patrick Gay Bellile
Un livre
Amour choral
Par
Patrick Gay Bellile
Le Matricule des Anges n°225
, juillet 2021.