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Poésie La pureté du monde

avril 2001 | Le Matricule des Anges n°34 | par Xavier Person

Stéphane Bouquet s’essaie à un baroque du quotidien. Des convulsions de néant rythment l’aller-retour entre prose et poésie, parce que rien ne restera de nos vies vaines.

Dans l’année de cet âge

Le poème serait presque rien, juste un instant saisi, instant de rien, où presque rien ne se passe que l’éclat d’un peu de jour, que la lumière vite évanouie d’un désir. Le poème dans l’élan de son écriture se tord sur lui-même, s’atrophie de ce qu’on atteint si rarement (la plénitude d’être, le plein bonheur d’exister, l’épanouissement d’un désir en sa consomption). Le poème en lui-même porte trace de l’éphémère, il est fragile et clair, et lumineux, posé toujours au bord de son propre effacement, sans emphase, sans trop d’espoir, mais sans amertume. De l’insistance vaine des jours, de leur vanité et de leur platitude, les poèmes du premier recueil de Stéphane Bouquet saisissent la fulgurance de néant. Troués de blancs, ils s’animent avant tout du mouvement de leur propre effacement, disparaissent presque sous la poussée de l’ellipse, se heurtent, achoppent, se taisent pour ainsi dire au moment où ils parlent : « Le garçon si beau qui passe/ ne sait pas que ma vie/ est cet équilibre tenu/ entre deux compositions du néant/ Il ignore même qu’il y a ma vie ».
Le ton de la complainte, en ses répétitions, ses lamentations, instaure un certain ton. Il fait qu’à la lecture des poèmes de Stéphane Bouquet on finit par entendre une voix, un peu dolente certes, mais étrangement incarnée. La reprise incessante des regrets (des corps qu’on n’aura pas caressés, des visages, des sourires dont l’éclat nous échappent, des livres qu’on n’a pas écrits, de notre vie qui s’évanouit avant qu’on en ait vraiment joui) établit une complicité peu à peu, une proximité. Dans l’année de cet âge est de ces livres, modestes, au premier abord anodins, mais qui finalement nous accompagnent, peu à peu nous installent dans une secrète connivence.
De plus, chacun des 108 poèmes est suivi à la fin du livre de ce que l’auteur nomme une « prose afférente » : plus ou moins long commentaire, ce texte qu’on lit en parallèle du poème explicite les conditions de sa création, revient sur les circonstances, en éclaire le contexte. De la sorte, le passage du poème à la prose, et réciproquement, accentuant encore le principe d’insistance, crée une distanciation un peu moqueuse, ruinant le sérieux de la plainte, rétablissant un mouvement là où tout semblait arrêté, entraînant tout dans une énergie railleuse, mais dans un mouvement plus vital aussi bien.
Aux torses baroques du poème correspondent en les accentuant, les outrant, les circonvolutions tourmentées de la prose, qui elles aussi cherchent à saisir quelque chose de l’ordre de l’évanescence, mais dans une sorte de gestuelle douloureuse, vite affolée, dans des spasmes d’écriture, pourrait-on dire, des crispations d’angoisse ou des tremblements qui parfois, heureusement, mènent à la délivrance de la jouissance, à des rémissions qui illuminent. Surgissent alors les clartés de certains ciels, éclaircies soudaines, soudains silences aux confins apaisés des tumultes : « à gravir des sentiers, à rejoindre de moyens sommets, à attendre le détour où enfin surgiraient le lac, l’eau des glaciers, la pureté du monde ».

dans l’année de cet âge
stéphane bouquet
Champ Vallon
126 pages, 78 FF

La pureté du monde Par Xavier Person
Le Matricule des Anges n°34 , avril 2001.
LMDA PDF n°34
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