Le « bon docteur Hata » vit une retraite paisible dans un petit bourg des États-Unis. D’origine coréenne, adopté enfant par une famille de Japonais, Franklin Kurohata précise « je ne suis pas du tout docteur ». Jamais sa figure de citoyen respectable ne laisserait penser à une imposture. Pourtant, tandis qu’il se remémore comment il s’est brouillé avec sa fille adoptive Sunny, (une jeune Coréenne) d’autres souvenirs refont surface. Une faille vient lézarder la froide et lisse apparence de sa vie ; son passé s’y engouffre, révélant l’image d’une autre Coréenne, K., arrachée à son pays durant la guerre pour servir de « femme de réconfort » à l’armée japonaise. Peu à peu, le présent qui l’entoure et le monde rassurant qu’il a pris soin de créer se diluent et les souvenirs tapis dans sa nuit resurgissent pour lacérer la surface étale des apparences. Par touches légères et précises, Chang-rae Lee, d’origine coréenne, cisèle le portrait sensible d’un homme hanté par l’échec et la peur de se dévoiler. En héritier de Fitzgerald, il pourrait faire dire à son personnage : « My politeness is a trick of my heart ».
Les Sombres Feux du passé
Chang-rae Lee
Traduit de l’américain par Jean Pavans
L’Olivier 363 pages, 140 FF (21,34 €)
Domaine étranger Les Sombres Feux du passé
septembre 2001 | Le Matricule des Anges n°36
| par
Catherine Dupérou
Un livre
Les Sombres Feux du passé
Par
Catherine Dupérou
Le Matricule des Anges n°36
, septembre 2001.