La lettre de diffusion

Votre panier

Le panier est vide.

Nous contacter

Le Matricule des Anges
ZA Loup à Loup 83570 Cotignac
tel ‭04 94 80 99 64‬
lmda@lmda.net

Connectez-vous avec les anges

Vous n'êtes actuellement pas identifié. Pour pouvoir commander un numéro, un abonnement ou bien profiter, en tant qu'abonné, des archives en ligne, vous devez vous connecter avec votre compte.

Retrouver un compte

Vous avez un compte mais vous ne souvenez plus du mot de passe ? Vous êtes abonné-e mais vous vous connectez pour la première fois ? Vous avez déjà créé un compte, peut-être, vous ne savez plus trop ?

Créer un nouveau compte

Vous inscrire sur ce site Identifiants personnels

Indiquez ici votre nom et votre adresse email. Votre identifiant personnel vous parviendra rapidement, par courrier électronique.

Informations personnelles

Pas encore de compte?
Soyez un ange, abonnez-vous!

Vous ne savez pas comment vous connecter?

Domaine étranger Corée aigre-douce

novembre 2005 | Le Matricule des Anges n°68 | par Dominique Aussenac

Avec « Le Vieux Jardin », Hwag Sok-Yong délivre un long chant intimiste et tendre sur la prison, l’exil, les rêves déçus de vie meilleure.

Le Vieux Jardin

Des deux Corée, celle du Nord, malgré le secret qui l’entoure, fait souvent parler d’elle. Dictature communiste et népotique d’un autre temps, ses famines, ses velléités à posséder la bombe atomique défrayent les chroniques. La Corée du Sud présente, elle, un visage ultra-moderne, policé et entreprenant. On en oublierait presque que la partition n’existe que depuis une cinquantaine d’années. On en oublie que face au pays frère et communiste, les Américains et leurs alliés ont opposé une autre dictature tout aussi répressive et anti-démocratique et ce jusqu’en 1998. Hwank Sok-Yong garde tout cela en mémoire. Cette année-là, ne fut-il pas gracié après sept ans de prison pour atteinte à la sûreté nationale.
Né en 1943 en exil, pour fuir l’occupation japonaise, il sera très tôt le témoin de la guerre de Corée, deviendra arbitrairement citoyen sud-coréen. En 1966, enrôlé dans les troupes américaines au Vietnam, il est chargé du nettoyage, efface les traces de massacres et enterre les morts. Expérience qu’il décrit dans L’Ombre des armes (Zulma). Pour pouvoir contrer la censure, il publie ensuite l’épopée d’un bandit du temps passé Jang Gilsan (non encore traduit, ndlr). Écrivant pour le théâtre, plusieurs membres de sa troupe seront massacrés lors de la répression du soulèvement de Kwangju en 1980. D’écrivain engagé, il s’impliquera directement dans la lutte contre l’oppression, se rendra successivement en Corée du Nord, (ce qui lui vaudra la prison au retour), puis à New York et Berlin. En l’an 2000, après dix ans d’interruption d’écriture, il publie Le Vieux Jardin qu’il qualifie fort justement de « requiem décrivant la vie intérieure de la génération des années quatre-vingt qui rêvait d’une vie meilleure. » Dans ce roman ponctué d’éléments forcément autobiographiques, il évoque la libération après dix-huit années de prison de l’opposant O Hyônu qui apprend alors la mort de sa compagne. Han Yunhi, artiste peintre, lui a laissé un Journal écrit tout au long de ces années, quelques toiles, des petits riens et une fille. Ce portrait de femme surprend par sa force, sa beauté, sa finesse, sa tragique sérénité. Loin d’être triste et noir, le récit à deux voix alterne souvenirs de prison, années de lutte, amour, séparation, voyages, évolution picturale puis combat contre le cancer. Si l’auteur est explicite sur l’engagement, les conditions de la lutte, les épreuves, les souffrances, il n’utilise jamais la phraséologie, la langue de bois. Son rapport au monde est direct, il écrit au plus près des êtres, privilégie la lenteur, filmant au ralenti les petits et grands émois. Il s’en explique : « Après la guerre du Viêt Nam, mon écriture a changé une première fois, la deuxième fois cela a été après mon exil à Berlin (…). Avant le réalisme objectif, critique, m’importait. Après j’ai commencé à m’intéresser à ce qui est de l’ordre de l’intime, du quotidien… » (entretien à Libération, mai 2002). En filigrane, derrière la superbe description de l’inadaptation du héros à la société nouvelle, l’amertume et la déception après tant d’années de lutte, le magnifique portrait de femme, apparaît un hommage à ce que l’on pourrait considérer comme la Corée unie éternelle, sa poésie, ses arts picturaux, ses paysages, ses saveurs, ses valeurs, ses traditions. Hommage exempt de conservatisme ou de pétainisme, mais porteur de forces de vies, de forces morales conduisant à une vision de la Corée, de la vie, du monde, pleine d’espoir et de lucidité.
Dans la postface, les derniers mots de Hwank Sok-Yong sont : « Lorsque je pense aux souffrances, au gâchis et aux désespoirs qu’a engendrés le siècle dernier, je me pose la question que d’innombrables personnes ont déjà posée : y a-t-il encore de l’espoir ? Tant qu’il reste possible de s’interroger ainsi, tout peut recommencer. Je salue après un long silence les gens que j’aime, mes amis, et je les invite à marcher à mes côtés. »

Le Vieux Jardin
Hwang Sok-Yong
Traduit du coréen
par Jeong Eun-Jin
et Jacques Batilliot
Zulma
608 pages, 23

Corée aigre-douce Par Dominique Aussenac
Le Matricule des Anges n°68 , novembre 2005.
LMDA papier n°68
6,50 
LMDA PDF n°68
4,00