Je revoyais les enfants juifs de Stolbtsy, maigres comme des moineaux aux ailes coupées, et je continuais à penser que tous les Allemands, pas seulement les SS de Stolbtsy, étaient des bêtes et non des hommes « . C’est en ayant cette vision d’horreur, pendant la campagne de Russie, que Nuto Revelli (1919-2004), alors soldat fasciste, ouvre les yeux sur son aveuglement idéologique. Un choc qui le jette aussitôt dans la résistance italienne. Il voue alors une haine féroce à tout ce qui peut être allemand. Une position extrême que Nuto Revelli ne parvient pas à assumer complètement. Dans Le Disparu de Marburg, il poursuit ce qui est devenu la quête de toute sa vie d’homme et d’écrivain : guérir à jamais de la haine. » Je n’éprouve aucune pitié à l’égard des Allemands. Mais s’il en a existé même un seul différent de l’image que je me suis faite d’eux, je voudrais vraiment connaître son histoire « . Inlassablement, il recueille les témoignages et fouille les archives pour identifier ce soldat disparu qui, un jour de 1944 alors qu’il se promenait à cheval en Italie du Nord, a sans doute été tué par des partisans italiens. Un jeu de la mémoire douloureux, rendu encore plus difficile par les souvenirs de guerre de Revelli qui ne demande qu’à revenir et influencer son enquête. Construit comme un journal, cet essai-témoignage dépasse de beaucoup la simple contribution historique. Le malaise permanent et jamais résolu de Revelli est sans doute celui d’une nation entière encore marquée par la distinction fasciste-résistant. » Comment ferez-vous pour vous réconcilier quand la guerre sera finie ? Vous les Italiens, vous êtes tellement divisés ", a confié un jour un officier allemand à un témoin.
Le Disparu de Marburg de Nuto Revelli
Traduit de l’italien par Olivier Favier, Rivages, 174 pages, 17 €
Domaine étranger Mémoire écorchée
octobre 2006 | Le Matricule des Anges n°77
| par
Franck Mannoni
Un livre
Mémoire écorchée
Par
Franck Mannoni
Le Matricule des Anges n°77
, octobre 2006.