Certes l’écriture est souvent conventionnelle et les recettes éprouvées : ce sont, venues du roman gothique, de Jane Eyre et du roman victorien, des histoires de familles troubles avec naissances cachées puis tardivement révélées. On aura d’abord plaisir à l’impeccable enchevêtrement de l’intrigue, mystérieuse à souhait. La jeune fille d’un libraire, pour avoir publié une étude sur les frères Goncourt, se voit commander d’écrire la biographie d’une étrange vieille dame des Lettres anglaises. C’est d’abord une édition rare qui l’étonne : sous une jaquette titrée « Le treizième conte » elle est surprise de n’en trouver que douze qui deviendront « Contes de la métamorphose et du désespoir ». L’auteur, Miss Winter, vieille solitaire aux récits plus ou moins fiables et proche de la mort, s’engage à lui livrer le fil des événements de sa vie. Ce seront des histoires de jumelles aux yeux verts, d’éducations négligées, de claustrations, de manoir empoussiéré, de cadavres et d’incendies bien romanesques… Mais au-delà, on sera sensible au soin avec lequel Diane Setterfield a su rendre l’empathie entre la biographe et son sujet pour qui « la vie n’est qu’un tas de compost », car toutes les deux sont concernées par le « mythe autour de leur naissance » et par de troubles gémellités. On frôle également le fantastique, à la limite d’Henry James, lorsque dans des miroirs extérieurs ou intérieurs on ne sait surgissent des silhouettes fantomatiques de sœurs perdues. Enfin, l’amateur d’éditions rares et de lectures envoûtantes trouvera ici son double parmi ces bibliomanes personnages.
Le Treizième Conte de Diane Setterfield
Traduit de l’anglais par C. et J. Demanuelli,
Plon, 408 pages, 21 €
Domaine étranger Biographies jumelles
mars 2007 | Le Matricule des Anges n°81
| par
Thierry Guinhut
Un livre
Biographies jumelles
Par
Thierry Guinhut
Le Matricule des Anges n°81
, mars 2007.