Mouvements N°67 (du polar à l’écran)
Du polar à l’écran, ou ce qui se passe lorsqu’on adapte un roman noir : le sujet a l’avantage d’être précis, et des éclairages divers (entretiens, études, nouvelle même) font espérer pas mal de matière. Malheureusement, la « revue des idées et des luttes » s’empêtre assez vite dans les simplifications idéologiques, tranchant sans trop d’état d’âme entre policier cathodique – normatif – et polar papier – subversif : car on y critique l’engagement « sur des questions humanitaires » ou la « représentation des femmes ». Ajoutez à cela, au fil des contributions, quelques redites côté littéraire (la relation entre naissance du roman noir et défaites syndicales est connue depuis Manchette), et des approximations au rayon des films (non, L’Emploi du temps de Laurent Cantet ne décrit pas la trajectoire d’un assassin). Heureusement, les nuages finiront par se déchirer page 86 : d’abord avec une étude de David Buxton qui ramène l’art de la série policière à ses fondements matériels (comment une nouvelle caméra modifie les rythmes de tournage, combien le « calcul de rentabilité fin » des sondeurs a modelé les intrigues), puis avec les propos marrants de Romain Slocombe, qui, évoquant l’adaptation d’un de ses romans par France 2, raconte la découverte de scènes sadomaso « absentes du livre et filmées de manière grotesque », et précise que cela l’a tout de même amusé.
G. M.
Mouvements N°67
La Découverte, 176 p., 15 €