Voilà deux textes que l’auteur québécois adresse aux jeunes spectateurs, deux textes tendres, graves, et drôles, qui parlent de choses aussi essentielles que la mort d’un enfant, ou bien ce qui se passe dans la tête d’une adolescente possiblement enceinte. Monstres raconte une minute de la vie de Nelly, soit le temps de réaction d’un test de grossesse. Une minute durant laquelle Nelly se voit déjà aux prises avec le petit monstre. Elle imagine les réactions de son père, de sa mère, de sa meilleure amie. Elle veut cet enfant, elle le redoute aussi, et ses rêves, ses angoisses inventent la vie qui va s’ensuivre. Une vie compliquée, mais joyeuse, enlevée, même si le possible père est parti. Cette petite Nelly est prête à déplacer des montagnes pour que son petit monstre trouve une place. Et l’écriture a le rythme et l’énergie du personnage principal. Dans le second texte, Vipérine en a assez de sa sœur, morte depuis quelque temps déjà. Une sœur exemplaire dont la famille n’arrive pas çà faire le deuil. « (…) tout va de travers depuis que t’es partie ! Maman a pris le large, Papa joue les zombies. Y a juste quand y regardent ton urne posée sur la cheminée qu’y ont l’air d’être un petit peu là, ensemble. » Alors elle décide de s’en débarrasser, de jeter ses cendres dans la rivière. Mais pour faire cela, il faut d’abord défaire le ruban qui retient sa sœur prisonnière au milieu du jardin de la mort. Pascal Brullemans a écrit un texte pudique et sincère pour raconter la mort d’une enfant. Comment accepter l’inacceptable ? Comment vivre avec l’absente ? Comment ne pas être celle qui prend la place ? L’écriture tonique, vivante, nous tient à distance du pathos et nous fait éprouver beaucoup de tendresse pour cette petite Vipérine et sa terrible mission.
P.G.B.
Monstres et Vipérine
Pascal Brullemans
Lansman éditeur, 36 pages, 9 € chacun
Théâtre Monstres Vipérine
janvier 2013 | Le Matricule des Anges n°139
| par
Patrick Gay Bellile
Des livres
Le Matricule des Anges n°139
, janvier 2013.