Sommes-nous en train de devenir des assis, aux jambes inutiles, aux pieds perpétuellement fatigués ? Êtres pensant que nous sommes, qui sait si nous ne sommes pas en train de perdre notre dimension naturelle, voire cette pensée que la marche stimule… Pascal Picq, anthropologue, nous conte comment les grands singes se sont redressés pour devenir ces bipèdes doués de langage : les hommes. Voilà pourquoi il plaide la cause de la marche, de façon à « sauver le nomade qui est en nous », non au sens d’une régression, mais d’une continuité, façon d’assumer notre condition originelle autant que notre corps-esprit de voyageurs.
Il n’est pas impossible qu’il y ait, malgré nos progrès scientifiques et civilisationnels, une corrélation entre la mobilité et l’inventivité, une corrélation entre la sédentarité et la fatigue des civilisations. Homo erectus, Homo sapiens, Homo assis ? « En ce début de XXIe siècle, l’humanité ne serait-elle pas brutalement en danger pour cause de sédentarité pesante ? », demande Pascal Picq. Il cite pourtant des philosophes marcheurs : Socrate et les péripatéticiens, le Christ jusque sur les eaux, Rousseau herborisant au bord des chemins, Thoreau arpentant les bois de Walden ; et des scientifiques au service de quelques pas sur la lune : « le langage et la marche procèdent selon les mêmes chemins analogiques de la pensée et du sens ». Un essai riche et stimulant, qu’il faut, n’en doutons pas, lire en marchant ; mais non sans regarder où l’on va.
Thierry Guinhut
LA MARCHE : SAUVER LE NOMADE QUI EST EN NOUS
DE PASCAL PICQ
Autrement, 288 pages, 17,50 e
Essais La Marche : Sauver le nomade qui est en nous
février 2016 | Le Matricule des Anges n°170
| par
Thierry Guinhut
Un livre
Par
Thierry Guinhut
Le Matricule des Anges n°170
, février 2016.