Il a plu des oiseaux morts, et tout le monde s’en fout. Des cadavres à plumes tombent du ciel, et ça n’intéresse personne. Personne, ou presque – et tout se joue dans ce presque personne : Victor Pouchet, lui, fait de ce phénomène le centre de sa jeunesse. Pourquoi les oiseaux meurent ? Les pigeons-paons de l’Oisellerie du Pont-neuf chuteront-ils un jour ? Et d’où vient qu’on se contente du mot « pluie » pour nommer un phénomène qui évoque plutôt « la fin du monde, la disparition des lois de la gravité, l’impossibilité du vol et de la légèreté » ? Autant de questions que Victor Pouchet cherche moins à résoudre qu’à formuler, au travers d’une enquête normande aux allures de contre-expertise métaphysique.
De ce livre, on pourrait dire qu’il est le récit, drôle et piquant, d’une tragédie minuscule qu’on ne voit même plus : celle de vivre dans un monde où les oiseaux meurent. On pourrait aussi dire qu’il est un long poème en prose, une blague tendre de 200 pages semblant avoir des poils, des ailes ou de la peau tant elles sont grouillantes et délicates, tant on se surprend à désirer que d’autres vivants, à leur tour, s’y frottent. Pas n’importe qui, toutefois. De même que certains livres sont des preuves de culture, certains auteurs sont des mots de passe, choses précieuses qu’on s’échange sous le manteau dans une même confrérie de sensibilités. Dans celle des spécialistes de « l’insensé minuscule », ceux qui consolent leur difficulté à vivre le tout par le charme du détail et dans laquelle on trouvait Frédéric Berthet, cité en exergue, dans cette constellation de la miniature là, donc, rayonnera désormais Victor Pouchet, expert en oiseaux décédés.
Blandine Rinkel
Pourquoi les oiseaux meurent, de Victor Pouchet
Finitude, 185 pages, 16,50 €
Domaine français En pente douce
septembre 2017 | Le Matricule des Anges n°186
| par
Anthony Dufraisse
Un livre
En pente douce
Par
Anthony Dufraisse
Le Matricule des Anges n°186
, septembre 2017.