Que l’on soit trumpmaniaque ou trumpophobe, il est bon de s’interroger sur ses électeurs, dont les petits blancs déclassés de l’Amérique profonde. Le livre de J.D. Vance, publié en 2016 aux États-Unis tombe à point. S’il se présente comme le roman autobiographique d’un enfant puis d’un jeune homme venu du tréfonds du Kentucky et de l’Ohio, il n’en est pas moins un document sociologique d’une grande pertinence.
Les usines ferment ou s’enfuient, le chômage gronde, le déclin économique ronge les consciences : « toutes les grandes entreprises comme Armco sont en train de mettre la clé sous la porte, et c’est une population dont les qualifications sont peu adaptées à l’économie moderne ». Mais loin de se complaire dans la rhétorique victimaire de l’ « Elégie », Vance souligne : « Vous pouvez traverser une ville dont 30 % des jeunes hommes travaille moins de vingt heures par semaine sans trouver personne qui ait conscience de sa propre fainéantise ». Plutôt que de se plaindre du monde tel qu’il évolue, les habitants doivent affronter la vérité sur eux-mêmes : « Jackson est assurément pleine de gens charmants, mais la ville est également pleine de drogués, et il y a au moins un homme qui a trouvé le temps de faire huit enfants et pas celui de travailler pour les faire vivre ». Sans oublier l’alcoolisme et la violence. Le réquisitoire est cruel, mais réaliste. Comment notre auteur s’en est-il sorti ? « Maman m’a emmené à la bibliothèque de la ville avant même que je ne sache lire, m’y a inscrit, m’a montré comment emprunter des livres et fait en sorte qu’il y en ait toujours à la maison ». Avocat pour un fonds d’investissement, écrivain chéri des médias américains, il vit aujourd’hui à San Francisco. CQFD. Thierry Guinhut
Hillbilly élégie de J.D. Vance
Traduit de l’anglais (États-Unis) par Vincent Raynaud, Globe, 288 pages, 22 €
Domaine étranger Hillbilly élégie
septembre 2017 | Le Matricule des Anges n°186
| par
Thierry Guinhut
Un livre
Par
Thierry Guinhut
Le Matricule des Anges n°186
, septembre 2017.