L’on ne peut se fier à rien de vrai » : ce sont les mots de Parménide qui ouvrent ce récit autobiographique, dans lequel le mensonge règne. En effet, depuis sa plus tendre enfance, l’auteur baigne dans les fabulations. Sa mère, mythomane en puissance, lui a ainsi confié l’avoir conçu avec une liaison de passage, un Grec rencontré par hasard à Athènes. L’histoire connaît un bon nombre de versions différentes, qui sommeillent jusqu’à un certain Noël où, assistant à une messe orthodoxe avec elle, Constantin Alexandrakis décide d’en avoir le cœur net. À 30 ans passés, il se lance à la recherche de celui qu’il nomme le « Géniteur ».
Cette décision irréfléchie se mue très vite en fouille généalogique, explorant cette longue « histoire de femmes avec des hommes absents ». Victimes d’une cruelle fatalité, sa grand-mère et sa mère ont été toutes deux abandonnées par leurs amants grecs, et ont élevé leurs enfants seules. Une double solitude qui a fortement marqué l’enfance du narrateur, et continue de le hanter, puisque « le passé n’est jamais passé, bien au contraire, le passé arrive en permanence ». Laissant libre cours aux souvenirs d’enfance, tantôt heureux, tantôt traumatiques, il se lance dans sa quête avec une énergie pleine de fraîcheur, d’humour et de désespoir.
Rythmé par des allers et retours en Grèce, pays en proie à la crise que l’on sait, le récit prend rapidement des allures d’épopée. Nourri par la mythologie et par ses lectures (Jean-Pierre Vernant), Constantin Alexandrakis questionne notre besoin dévorant de vérité et d’identification. L’écriture nerveuse, pleine de parenthèses, d’ajouts et de digressions de Deux fois né célèbre humblement, à la manière d’une histoire antique qui n’aurait ni début ni fin, le parcours d’un homme « bâtard », à l’ « identité parfois insaisissable comme les replis du serpent ». Camille Cloarec
Deux fois né, de Constantin Alexandrakis
Verticales, 298 pages, 20,50 €
Domaine français Deux fois né
novembre 2017 | Le Matricule des Anges n°188
| par
Camille Cloarec
Un livre
Par
Camille Cloarec
Le Matricule des Anges n°188
, novembre 2017.