Le nom de Giuseppe Garibaldi (1807-1882), l’un des infatigables artisans de l’unité italienne, est synonyme d’héroïsme et de romantisme. Pourtant, quand le général prend la plume en 1867 pour écrire ce roman de témoignage, il vit retiré sur son île de Caprera, au nord de la Sardaigne. Tenu à l’écart de la vie politique, il se concentre sur l’indispensable devoir de mémoire. Il veut rendre hommage aux camarades tombés sur le champ de bataille en 1849. Rome, alors aux mains de Garibaldi et de ses Chemises-Rouges, tombe avec l’intervention des Français. Au fil de son récit, l’auteur défend les citoyens volontaires qui ont tout quitté pour faire naître une nation. Le personnage de Cantoni sert de prétexte à cette ode enflammée. Souvent lyrique, parfois malheureux dans ses métaphores, mais toujours sincère, transparent dans ses excès passionnés, Garibaldi remplit sa mission de passeur vers les jeunes générations. Emporté par ses détestations, il ne mâche pas ses mots. Les Français, alliés du pape Pie IX, subissent les assauts de l’écrivain. La « prêtraille » concentre aussi une bonne part de ses attaques : « Les prêtres seuls étaient capables de faire ainsi descendre ce grand peuple jusqu’au degré le plus infime de l’échelle humaine ». Incarnée par le perfide Gaudenzio, la caste des soutanes symbolise pour lui la trahison par excellence. À l’opposé, Cantoni et ses compagnons sont parés de toutes les vertus. Beaux, intrépides, durs au combat, ils font revivre l’idéal de l’Italie antique. Roman, essai, pamphlet, brûlot, Cantoni le volontaire est plein de fougue. Jamais l’auteur ne s’efface, toujours il prend position, quitte à abandonner pendant quelques pages les aventures de ses héros. Garibaldi s’affranchit des codes de composition sans toujours échapper aux clichés du romanesque. Il n’en reste pas moins lié aux grands observateurs engagés du XIXe siècle, comme Hugo ou Chateaubriand. Son récit foisonnant emporte le lecteur dans les tourments du Risorgimento.
Franck Mannoni
Cantoni le volontaire, de Giuseppe Garibaldi
Traduit de l’italien par Tullio Martello, La Fosse aux ours, 248 pages, 20 €
Domaine étranger Les élans de Garibaldi
mai 2018 | Le Matricule des Anges n°193
| par
Franck Mannoni
Un livre
Les élans de Garibaldi
Par
Franck Mannoni
Le Matricule des Anges n°193
, mai 2018.