Sous une couverture sympathiquement kitsch – drapeau breton et palette de peinture sur un fond jaune vif –, on découvre un livre réjouissant. Si bien sûr on aime – et c’est notre cas – le genre burlesque armoricain à la sauce KFC (vous comprendrez en lisant). En ce qui nous concerne, on avait laissé son auteur, Jean-Luc Coatalem, en Corée du Nord. C’était en 2013 avec Nouilles froides à Pyongyang, également au Dilettante. Entre-temps, on a vu passer Fortune de mer (2015), Mes pas vont ailleurs (2017) et La Part du fils (2019), ceux-là chez Stock. Coatalem écrit beaucoup – déjà une vingtaine de livres à son actif – et voyage non moins, en sa qualité de grand reporter dans la presse. Nul besoin de passeport pour aborder Le Grand Jabadao – sarabande en jactance locale –, on reste en France, cap à l’ouest, direction le Finistère. En arrivant dans ce bout du monde, un galeriste parisien n’est pas au bout de ses surprises. Est-ce bien un authentique Gauguin, ce tableau qu’on voudrait lui fourguer sous le manteau ? Les revendeurs sont en tout cas des originaux : deux frangins rouquins, l’un handicapé amateur d’échecs et de polars, l’autre vrai poisson dans l’eau option nageur de combat. « Deux petits retraités », ces jumeaux Kerven, mais surtout des « infréquentables ». Le personnage de Coatalem se méfie, de peur d’être baladé et banané. Quant à nous, on se promène dans des paysages bretons, porté par le style impressionniste du romancier. Il sait y faire, côté atmosphère à suspens, et nous on se laisse ballotter avec plaisir. Quand embrouille rime avec barbouille…
Anthony Dufraisse
Le Grand Jabadao,
Jean-Luc Coatalem
Le Dilettante, 188 pages, 17 €