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Domaine étranger La vie n’est pas un fleuve tranquille

avril 2022 | Le Matricule des Anges n°232 | par Martine Laval

Avec humour et finesse, cet anthropologue brésilien invente une autofiction en forme de récit d’aventures… pour mieux se moquer de lui-même.

L' Attrapeur d’oiseaux

Moment de retrouvailles : « – T’es arrivé ? – Je suis arrivé. – T’es pas malade ? – Non. » Ainsi vont les habitudes (ou les traditions). Le narrateur, quadra plutôt las, anthropologue plutôt essoré, est ainsi salué par son guide, et c’est parti pour une énième expédition, pour de longs jours et de longues nuits à bord d’une pirogue qui glisse sur un fleuve ondulant dans la jungle, entre le Brésil et la Colombie, dans un espace aussi dense que flou – presque un nulle part. Les frontières ici ne signifient pas grand-chose. Les coutumes, si. Le narrateur qui partage avec l’auteur quelques points communs – l’âge, le métier, peut-être les doutes – n’est pas chercheur d’or mais chercheur d’histoires. Celle qu’il nous raconte vaut son pesant (d’or). Il existerait donc au fin fond du fond de cet enfer vert, une légende, un mythe fabuleux, celui de l’Attrapeur d’oiseaux. Quel est-il ? D’où vient-il ? Quels sont ses pouvoirs ? Autant de questionnements que tout bon anthropologue se doit d’éplucher. Mais les budgets de laboratoire de recherche (apparemment au Brésil comme en France) ne sont plus à la hauteur. Notre narrateur, aventurier de l’histoire perdue, va devoir se débrouiller et donner de sa personne, beaucoup.
Pedro Cesarino l’anthropologue auteur de ce premier roman au ton résolument joyeux, moqueur, est un conteur né, un extraordinaire attrapeur d’histoires auxquelles il sait donner rythme et sens. Parfois en piteux état – notre héros se met en scène, s’adonne à l’autofiction la plus guillerette qu’il soit et énumère ses bobos : ennui, diarrhée, chaleur, moustiques… et incompréhension. Quelle attitude amicale peut avoir un scientifique chez les Indiens alors qu’il ne cherche qu’à leur « arracher l’histoire ». Il essaie de se convaincre : « Il faut que j’y arrive, je n’ai pas le choix. » Est-ce de l’étude ou du vol ? Quels liens notre héros fatigué peut-il tisser avec ceux qui l’ont adopté et lui déclarent amitié alors que lui se demande s’il n’a pas raté sa vie à rester avec eux, alors qu’il rêve d’une femme, d’une famille, d’une vie de boulot au bureau peut-être, d’Internet et autres modernités ? Que fait-il de tous ses mensonges, de ses non-dits ? Comment vivre sa « supériorité » sinon sa « suprématie » ? Peut-être en apprenant les choses essentielles comme solidarité, respect, dignité… ou en laissant au peuple des eaux et des forêts le soin de garder précieusement leurs histoires… Dernière chance pour l’anthropologue : écrire un roman.
Pedro Cesarino, sans nul doute rompu aux écritures académiques, a donc choisi la fiction pour sonder et espérer éclairer cette vaste interrogation aux allures de sujet de recherche universitaire : comment aborder l’autre, son langage, sa culture sans lui porter préjudice ? « Après toutes ces années à cohabiter avec eux, je ne savais toujours pas à quoi baiser ici pouvait ressembler, et encore moins vivre avec une de leurs femmes. » Voici donc les limites de la science mais pas de la fiction !

Martine Laval

L’Attrapeur d’oiseaux
Pedro Cesarino
Traduit du portugais (Brésil) par Hélène Melo
Rivages, 158 pages, 16 

La vie n’est pas un fleuve tranquille Par Martine Laval
Le Matricule des Anges n°232 , avril 2022.
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